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PIGEONS DOMESTIQUES.

pendant le cours de la sélection et des variations graduelles qui en ont été le résultat, la charpente osseuse interne et les formes extérieures ont été modifiées jusqu’à un certain point d’une manière corrélative.

Les ailes et la queue peuvent varier de longueur d’une manière indépendante, mais elles tendent cependant généralement à s’allonger ou à se raccourcir ensemble. Cela se voit chez les Jacobins et encore mieux chez les Runts, où certaines variétés ont la queue et les ailes très-courtes. Pour les Jacobins, la longueur remarquable des pennes des ailes et de la queue n’est pas un caractère dû à une sélection intentionnelle des éleveurs ; mais ceux-ci ayant depuis longtemps, au moins depuis 1600, cherché à augmenter la longueur des plumes renversées du cou, de façon que le capuchon pût enfermer plus complètement la tête, on peut admettre que l’allongement des rémiges et des rectrices soit un fait de corrélation avec le développement des plumes du cou. Chez les Culbutants courtes-faces, les ailes, proportionnellement à la taille réduite de cette race, sont courtes, mais il est intéressant de remarquer, vu la constance, dans la plupart des oiseaux, du nombre des rémiges primaires, que chez eux on n’en trouve que neuf au lieu de dix. Je l’ai moi-même observé dans huit individus : et la « Original Columbarian Society »[1] a fixé pour type des Culbutants à tête chauve, neuf rémiges blanches au lieu de dix, estimant qu’il n’était pas juste qu’un oiseau ne pût pas concourir et mériter un prix parce qu’il n’aurait pas dix rémiges blanches. D’autre part, chez les Messagers et les Runts qui ont le corps grand et les ailes longues, on a parfois constaté la présence de onze rémiges primaires.

M. Tegetmeier m’a signalé un cas curieux et inexplicable de corrélation ; c’est que les Pigeonneaux de toutes les races qui, adultes, deviennent blanches, jaunes, argentées (c’est-à-dire d’un bleu excessivement pâle), ou fauves, naissent presque nus ; tandis que tous les autres Pigeons colorés naissent bien couverts de duvet. M. Esquilant a cependant observé que les jeunes Messagers fauves sont moins nus que les jeunes Barbes ou Culbutants de même nuance. M. Tegetmeier a vu

  1. J.-M. Eaton, O. C., éd. 1858, p. 78.