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PRÉFACE.

savants avant Copernic avaient admis le mouvement du soleil et la fixité de la terre, que les calculs des modernes sont faux, que le témoignage de nos yeux et de tant de millions de nos ancêtres, tous intimement persuadés que le soleil tourne et que la terre reste immobile ? Que dirait cet astronome si l’on invoquait l’antiquité de cette croyance, si l’on prétendait que la science doit rebrousser chemin, jeter ses équations au feu, brûler la mécanique céleste, et en revenir à la religion des ancêtres et aux croyances du bon vieux temps ? Certes l’astronome rirait en entendant les palinodies de cet ignorant et le renverrait à l’école en disant : Apprenez les mathématiques, apprenez l’usage des télescopes et de nos instruments inconnus des anciens, apprenez ce que l’on a fait depuis en se servant de meilleures méthodes, et d’instruments perfectionnés d’observation ; mais cessez de me corner aux oreilles de vaines objections, car vous parlez d’une science que vous ne pouvez comprendre, parce que la base nécessaire, parce que les connaissances fondamentales sur lesquelles elle repose vous font complètement défaut.

Nous trouvons-nous dans une position différente vis-à-vis de certaines attaques ? Non, car nous pouvons dire que nous travaillons jour et nuit à examiner, à expérimenter les phénomènes de la vie, les fonctions mille fois plus délicates des êtres organisés : nous ne cessons d’interroger la nature sur les problèmes qu’elle nous pose, nous y apportons toute la sincérité imposée par la recherche de la vérité, et cependant voici venir des gens qui ne savent pas distinguer un muscle d’un nerf ou une écrevisse d’un poisson,