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CHÈVRES.

doute été regardée par plus d’un naturaliste comme la descendance de quelque forme primitive inconnue, ou au moins comme le produit d’un croisement avec cette forme.

CHÈVRES.

D’après les recherches récentes de M. Brandt, la plupart des naturalistes admettent que toutes nos chèvres descendent du Capra ægagrus des montagnes de l’Asie, peut-être mélangé avec une espèce voisine de l’Inde, le C. Falconeri[1]. Pendant la première partie de la période néolithique en Suisse, la chèvre domestique était plus abondante que le mouton, et cette race fort ancienne ne différait sur aucun point de celle qui existe aujourd’hui dans le pays[2]. Les races nombreuses qu’on rencontre actuellement dans diverses parties du globe, diffèrent beaucoup entre elles[3], et autant qu’on a pu en faire l’essai, sont fertiles dans leurs croisements réciproques. Les races sont si variées, que M. Clark[4] en a décrit huit formes distinctes importées dans l’île de Maurice seule. Une d’elles a des oreilles énormes, mesurant, d’après M. Clark, 19 pouces de long, sur 4 3/4 de large. De même que pour l’espèce bovine, les mamelles des races qu’on trait régulièrement se développent beaucoup, et, selon M. Clark, il n’est pas rare d’en voir dont les tétines touchent le sol. Voici quelques cas présentant des faits marquants de variation. D’après Godron[5], les mamelles diffèrent considérablement par la forme, suivant les races ; elles sont allongées dans la chèvre commune, hémisphériques dans la race angora, bilobées et divergentes dans les chèvres de Syrie et de Nubie. D’après le même auteur, les mâles de certaines

  1. Isid. Geoff. Saint-Hilaire, Hist. nat. gén., t. III, p. 87. — M. Blyth, Land and Water, 1867, p. 37, est arrivé à la même conclusion, mais pense que certaines races orientales sont peut-être en partie descendues d’une forme asiatique.
  2. Rütimeyer, Pfahlbauten, p. 127.
  3. Godron, De l’Espèce, t. I, p. 402.
  4. Ann. and Mag. of natural History, vol. II (2e  série), 1848, p. 363.
  5. De l’Espèce, t. I, p. 406. — M. Clark signale aussi des différences dans la forme des mamelles. Godron constate que dans la race nubienne le scrotum est divisé en deux lobes ; M. Clark en donne une preuve comique, car il a vu à Maurice un bouc de la race muscate acheté à un haut prix pour une chèvre en pleine lactation. Ces différences dans le scrotum ne sont probablement pas dues à une provenance d’espèces distinctes, car M. Clark a constaté une grande variation de forme dans ces organes.