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DROSERA ROTUNDIFOLIA.

limbe de deux feuilles près du sommet ; ce sommet se recourba au bout de quinze heures. Je plaçai aussi une mouche au milieu de la feuille ; au bout de quelques heures, les tentacules placés de chaque côté l’avaient embrassée, et, au bout de huit heures, la partie de la feuille située directement au-dessous de la mouche s’était un peu reployée transversalement. Le lendemain matin, au bout de vingt-trois heures, la feuille s’était si complètement recourbée que le sommet reposait sur l’extrémité supérieure de la tige. Dans aucun cas, les côtés des feuilles ne s’infléchirent. Je plaçai une mouche écrasée sur la tige foliacée, mais sans qu’aucun effet se produisît.

Drosera spathulata envoyé par le docteur Hooker. — J’ai fait seulement quelques expériences sur cette espèce australienne ; elle a de longues feuilles étroites qui s’élargissent graduellement vers le sommet. Les glandes des tentacules marginaux extrêmes, de même que chez le Drosera rotundifolia sont allongées et ne ressemblent pas aux autres. Je plaçai une mouche sur une feuille ; au bout de dix-huit heures, les tentacules adjacents l’avaient embrassée. Des gouttes d’eau gommée placées sur une feuille ne produisirent aucun effet. Je plongeai un morceau d’une feuille dans quelques gouttes d’une solution contenant une partie de carbonate d’ammoniaque pour 146 parties d’eau ; toutes les glandes noircirent instantanément, et je pus observer distinctement que l’agrégation se propageait rapidement dans les cellules des tentacules ; les granules de protoplasma se transformèrent bientôt en sphères et en masses affectant diverses formes, agitées des mouvements ordinaires. Je plaçai ensuite sur le centre d’une feuille 1/2 minime d’une solution contenant 1 partie d’ammoniaque pour 146 parties d’eau ; au bout de six heures, quelques tentacules marginaux placés aux deux côtés de la feuille s’étaient infléchis, et, au bout de neuf heures, ils se réunirent, au centre. Les bords latéraux de la feuille se recourbèrent aussi, de façon à former un demi-cylindre ; toutefois, dans aucune des quelques expériences que j’ai pu faire, le sommet de la feuille ne s’infléchit. La dose employée d’azotate d’ammoniaque dans l’expérience dont je viens de parler (c’est-à-dire 1/320e de grain, ou 0,202 de milligr.) était trop énergique, car au bout de vingt-trois heures la feuille mourut.

Drosera filiformis. — Cette espèce, de l’Amérique du Nord, se trouve en si grande abondance dans certaines parties du New-Jersey qu’elle recouvre presque le terrain. Selon Mme Treat[1], cette plante

  1. American Naturalist., décembre 1873, p. 705.