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DROSERA ROTUNDIFOLIA.

Première expérience. J’ai placé au moyen d’un même instrument pointu, sur le disque des feuilles, des gouttes qu’au moyen d’essais répétés je savais avoir un volume d’environ un demi-minime, soit le 1/960e d’une once liquide, ou 0,0296 millilitres, et j’ai observé à certains intervalles de temps l’inflexion des rangées extérieures de tentacules. Je m’assurai d’abord, au moyen de trente ou quarante expériences, que l’eau distillée placée de cette façon sur la feuille ne produit aucun effet, sauf toutefois, bien que très-rarement, l’inflexion de deux ou trois tentacules. En un mot, les nombreux essais que j’ai faits avec des solutions assez faibles pour ne produire aucun effet, conduisent toutes à cette même conclusion que l’eau est inefficace.

Deuxième expérience. Je plonge dans la solution à examiner la tête d’une petite épingle fixée à un manche. Je place, à l’aide d’une lentille, la petite goutte qui adhère à la tête de l’épingle et qui est beaucoup trop petite pour tomber d’elle-même, en contact avec la sécrétion entourant les glandes d’un, de deux, de trois ou de quatre tentacules extérieurs de la même feuille. J’ai bien soin de ne pas toucher les glandes elles-mêmes. J’avais supposé que les gouttes avaient presque toutes le même volume ; mais de nombreux essais m’apprirent que c’est là une grosse erreur. Je mesurai donc de l’eau, et j’enlevai 300 gouttes, en ayant soin d’essuyer la tête de l’épingle, chaque fois que je l’avais plongée dans l’eau, sur un morceau de papier buvard ; en mesurant de nouveau le liquide après cette opération, je dus conclure que chaque goutte comporte, en moyenne, un volume de 1/60e de minime. Je pesai de l’eau dans un petit vase, méthode d’ailleurs bien plus rigoureuse, et j’enlevai 300 gouttes comme je l’avais fait dans l’expérience précédente ; une nouvelle pesée du liquide m’indiqua que chaque goutte équivaut en moyenne à 1/89e de minime. Je répétai cette opération ; mais j’essayai cette fois, en sortant la tête d’épingle de l’eau obliquement et assez rapidement, d’enlever des gouttes aussi grosses que possible ; le résultat obtenu m’indiqua que j’avais réussi, car chaque goutte en moyenne équivalait à 1/19.4 de minime. Je répétai l’opération exactement de la même façon, et j’obtins pour résultat des gouttes ayant en moyenne 1/23.5 de minime. Si l’on se rappelle que, dans ces deux dernières expériences, j’essayai autant que possible de soulever des grosses gouttes, on peut conclure, en toute sûreté, que les gouttes employées dans mes expériences équivalaient en moyenne à 1/20e de minime, soit 0.0029 de millilitre. Je puis distribuer une seule de ces gouttes entre trois et même quatre glandes ; si les tentacules s’infléchissent c’est qu’ils ont absorbé une certaine partie de la solution, car les gouttes d’eau pure appliquées