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décision. Et, afin de ne point céder à de nouvelles tentations, je vais écrire et envoyer de suite au ministère un bref rapport dans lequel je déclare que les informations données par l’agent Foutier sont absolument sans base.



Quand j’arrive à Paris, mon père est déjà au courant de la communication que j’ai adressée à l’État-Major. Il ne cherche pas à dissimuler sa mauvaise humeur. On lui a fait sur mon compte les plus mauvais compliments ; on m’accuse de manquer d’esprit de subordination et d’intelligence, de ne pas savoir l’anglais. Mon père déclare que ces reproches ne sont guère exagérés. Ne m’avait-on pas déclaré, à mon départ, que les individus que j’avais à surveiller étaient des agents britanniques ? Ne m’avait-on pas dit qu’on attendait de moi une confirmation du rapport de l’agent secret ? J’aurais dû comprendre. Comprendre à demi-mot, cela révèle des aptitudes militaires. Un homme qui comprend à demi-mot possède le coup d’œil d’aigle nécessaire aux grandes opérations stratégiques. Mais moi….. Réellement, il désespère de mon avenir. La fibre militaire me manque complètement.

— J’ai cru, dis-je, que dire la vérité était agir en soldat.

— C’est agir en pompier ! répond mon père. Sous un régime démocratique comme le nôtre, un soldat est aussi un citoyen, mon garçon ! Et en cette qualité doit tenir compte des nécessités politiques. Ha ! Ha !… Mais on veut en faire à sa tête, ne rien écouter. Enfin….. Moi, je m’étais mis en quatre ; je pensais que je t’avais procuré le moyen de t’embusquer ici, tranquille comme Baptiste. Je te voyais déjà les galons de capitaine. Va te faire fiche….. Tout est à l’eau. Tu as une singulière façon de servir !