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der des détails, tandis que les huit hommes qui nous accompagnent, Hominard en tête, grimpent à l’envi sur la voiture. Le caporal, emporté par la curiosité, monte aussi sur un brancard.

— Tu peux regarder, va ! lui cria Queslier. Ce sont tes confrères qui l’ont assassiné, celui-là. Si tu avais deux sous de cœur, tu rendrais tes galons à ceux qui te les ont donnés, après avoir vu ça !

Le caporal bégaye, pleurniche.

— Pas de ma faute… moi… pas méchant…

— Mets-y un clou, eh ! cafard ! gueule Hominard qui a porté la main à sa cartouchière ; mets-y un clou, ou je te fous une balle dans la peau ! Les assassins n’ont qu’à fermer leur boîte, ici, ou on leur crève la gueule comme à des kelbs !

Le cabot, terrifié, jette les yeux autour de lui. Il est tout seul. Craponi, prévoyant la scène, s’est éclipsé aussitôt qu’il nous a vus monter sur le tombereau. On l’aperçoit, tout au bout de la route, silhouette ignoble d’animal lâche et fuyant.


— Je ne sais pas ce qui se passe en ce moment à El-Ksob, nous dit en terminant l’Amiral qui nous a expliqué comment Barnoux est mort, étranglé par les chaouchs ; mais ce que je puis vous assurer, c’est que, lorsque je suis parti, ça chauffait dur. Les hommes ne veulent pas sortir du camp et les gradés, qui sont réunis autour du capitaine, n’osent pas s’approcher d’eux. Ce matin, le Crocodile et une vingtaine d’autres parlaient de descendre le cadre et de déserter, avec armes et bagages, en Tripolitaine. Je ne sais pas comment ça a tourné, mais les gradés n’en mènent pas large. Moi, je ne voulais pas, d’abord, conduire le corps à Aïn-Halib, mais j’ai réfléchi. Autant valait moi