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— C’est un oubli, je l’admets… Cependant, rappelez-vous, capitaine, qu’il faut tout matriculer, à ces gens-là, jusqu’aux clous des souliers. Ils ne doivent rien perdre, rien égarer. Sans ça, le conseil de guerre… La discipline, voyez-vous, il n’y a que ça… la discipline !… oh ! moi, là-dessus, je me montrerai toujours impitoyable… moi, moi… je… voyez-vous… moi…


On lui a amené son cheval. Il l’enfourche.

— Lieutenant, prenez le commandement de la compagnie.


Tous les officiers nous ont fait manœuvrer, à tour de rôle. Ils n’y étaient plus. Ils donnaient des ordres saugrenus qui faisaient heurter les sections les unes contre les autres, au milieu d’un inextricable pêle-mêle. Ils perdaient la tête, visiblement ensorcelés par le charme qui se dégageait du dieu, éblouis par son éclat, fascinés par l’ascendant de son regard.

Et lui, tranquille, souriant, la jambe passée sur l’encolure de son cheval, les regardait de haut, paraissant leur savoir bon gré du trouble évident qu’il jetait dans leurs esprits, les remerciait du coin de l’œil ― Louis XIV daignant se montrer charmé d’avoir embarrassé un pauvre homme.


— Eh bien ! qu’en penses-tu, du général ? vient me demander Lecreux quand la revue est terminée. Crois-tu qu’en voilà un, au moins ? Ah ! s’ils étaient tous comme lui !…

Il semble très content, Lecreux. Il a été choisi entre tous pour exposer aux yeux du grand chef ses chemises et ses godillots. Il en aurait reçu un coup de pied dans le derrière, qu’il paraîtrait peut-être