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XVII


Voilà des mois que je ne sors pas de la prison. Quand les chaouchs ont pris un homme en grippe, ils ne le lâchent point.

Je souffre horriblement. Moralement d’abord. C’est une chose terrible que d’être obligé, avec un caractère violent, entier, d’avaler silencieusement tous les outrages et de ronger ses colères. Et puis, je suis seul. Personne, de près ni de loin, pour m’encourager, pour me mettre du cœur au ventre.


Eh bien ! j’aime mieux cela, au fond. Je préfère cet isolement, cet abandon, aux pitiés qui usent l’énergie et aux lamentations qui émasculent. Cela m’ôterait du courage, je crois, de savoir qu’on pleure sur mon sort ; et je sais gré à tous ceux qui pourraient s’intéresser à moi de leur ingratitude égoïste ; je leur sais gré de n’avoir jamais fait luire à mes yeux ces feux follets de l’espérance menteuse qui ne brillent que pour vous faire tomber, en disparaissant, dans les fondrières de l’abattement. J’ai foulé aux pieds, depuis