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vêtements déchirés, la figure égratignée par les ronces et les épines, remonte à son tour.

— Ah ! le pauvre gars ! il était tombé jusqu’au fond ! Il n’y a pas d’eau, dans ce puits-là… C’était plein de sang, par terre.

Le chaouch jette sur le cadavre son regard froidement idiot de bête méchante :

— Ça lui apprendra à aller chercher des nids au lieu de travailler…


Le soir, on nous a fait réunir pour nous lire un rapport spécial du capitaine :

« Le fusilier Lucas s’est tué, aujourd’hui, en tombant dans un puits. Il avait quitté le travail pour aller dénicher des nids de pigeons. Il est mort victime de son acte d’indiscipline et frappé aussi, sans doute, par la main de la Providence qui veut que nous fassions toujours preuve de mansuétude à l’égard des animaux et que nous ne les maltraitions point sans motif. Or, qu’y a-t-il de plus cruel que d’arracher du nid maternel, vivante image de la famille, de jeunes oiseaux sans plumes encore, pour les dévorer gloutonnement ? La punition qui frappe la désobéissance et l’inhumanité du fusilier Lucas doit servir d’exemple à tous les hommes de la compagnie et leur rappeler que Dieu, qui sonde nos cœurs, voit aussi toutes nos actions. »