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recommencer. Le capitaine du génie qui, aidé de quelques sapeurs, dirige les travaux, avoue bien qu’en faisant venir des tuiles, ce qui ne serait pas la mer à boire, on pourrait établir des couvertures un peu moins écrasantes pour les monuments. Seulement, ordre a été donné de former des voûtes, de couvrir en pierres. Et l’on forme des voûtes, et l’on couvre en pierres. Ça tient ce que ça tient. C’est toujours la France qui paye. Du reste, il déclare carrément qu’il se fiche de ça comme d’une guigne. On l’a envoyé à Aïn-Halib pour remettre debout des édifices peu solides, et il les remettra debout, malgré vent et marée. Il s’est mis à l’œuvre il y a un mois, paraît-il, et a commencé par faire tout flanquer par terre. Il a appris, le roublard, que la construction des bâtiments avait empli les poches de son prédécesseur, parti à Sfax pour y chercher la croix, et il ne veut pas paraître plus bête que lui. Il empochera même des bénéfices d’autant plus grands qu’il est décidé à employer les anciens matériaux. Il fait retailler les pierres et gratter soigneusement la chaux ou le plâtre qui y sont restés attachés.


La sueur de camisard ne coûte pas cher, on s’en aperçoit. Du matin au soir, il faut trimer comme des chevaux, bûcher comme des nègres, mouiller sa chemise. Et encore, si l’on n’attrapait que des calus aux mains, si l’on ne souffrait que des ampoules ! Si l’on n’avait pas perpétuellement les entrailles tordues par la faim, le visage souffleté par les injures bestiales et les menaces féroces des chaouchs ! Si l’on était traités en hommes, au moins, et non en nègres courbés sous la matraque !

Ah ! je comprends ceux qui désertent, ceux qui