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plaisir, nous qui ne demanderions qu’à nous faire crever la peau pour mettre un terme à un état de choses dont il a été victime. Parole d’honneur, les illettrés ont l’intelligence plus ouverte ; celui qui est couché à côté de moi, là, il comprend très bien…

— Celui qui a les bras couverts de tatouages ?

— Les bras ? Si tu disais le corps. Il est tatoué des pieds à la tête. Il est tatoué en amiral. Il a le costume complet ; les palmes par devant, les pans de l’habit brodé sur les fesses, les épaulettes sur les épaules, les ornements sur le cou et les bandes du pantalon sur les jambes. On lui a même tatoué une paire de bottes avec des glands, sur les mollets et sur les pieds. Il se nomme Pormelle, mais on l’appelle l’Amiral, à cause de ses tatouages. C’est un très bon garçon. Dans la tente, tu peux te fier à lui et à Barnoux, le bachelier. Barca… Dis donc, voilà au moins une heure que nous causons. Si nous dormions un peu ?

Oui, mais auparavant, je voudrais bien lui poser une question qui me brûle la langue.

— On m’a dit qu’il y avait des sorties, qu’on pouvait, au bout d’un certain temps, sortir de la compagnie et être versé dans l’armée régulière. Est-ce vrai ?

Queslier se met sur son séant.

— Oui, c’est vrai. Pour sortir d’ici, il y a deux moyens : faire comme celui-ci…

Et il étend le bras vers l’homme qui lui a adressé la parole tout à l’heure, et auquel il n’a pas voulu répondre.

— Qu’est-ce qu’il a fait ?

— Il a rendu un faux témoignage pour faire plaisir à un chaouch ; un chaouch qui voulait se débarrasser d’un pauvre diable qui l’embêtait. Le chaouch a pré-