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LETTRE VIII.

freux tourments : les uns fraternellement admis en la compagnie des anges, et affranchis de tous les maux, jouiront ici-bas et dans les cieux d’une paix parfaite, entreront par droit d’héritage dans la douceur d’un éternel repos et, ce qui dépasse tous les biens, habiteront pour toujours avec Dieu ; les autres, au contraire, n’auront jamais la paix ni avec Dieu ni avec eux-mêmes, et sur terre, et après la mort, ils seront condamnés à vivre avec les cruels démons. Que toute notre ardeur soit donc de nous attacher au Dieu bon, et d’avoir commerce intime avec le Seigneur, et de n’être pas rangés par le souverain juge au rang des réprouvés pour y endurer des peines méritées. Tel est le sujet de mes plus grandes alarmes ; et je demande la grâce de n’être pas précipité dans tous ces maux.

Mais il faut que je vous fasse part de la vision que Dieu envoya un jour à un saint personnage : n’en raillez pas ; car ce que je dirai est vrai.

VI. Étant un jour en Crète, je reçus l’hospitalité chez Carpus, personnage, s’il en fut, éminemment propre aux contemplations divines, à cause de l’extrême pureté de son esprit. Il n’abordait jamais la célébration des saints mystères sans qu’auparavant, dans ses prières préparatoires, il ne fût consolé par quelque douce vision. Or, il me racontait qu’il conçut un jour une tristesse profonde, parce qu’un infidèle avait ravi à l’Église et ramené au paganisme un nouveau chrétien dans le temps même des pieuses fêtes qui suivirent son baptême. Il devait prier avec amour pour tous les deux et invoquer le secours de Dieu Sauveur à dessein de convertir le païen et de vaincre l’apostat par la mansuétude ; il devait passer sa vie entière à les exhorter, jusqu’à ce qu’enfin ils trouvas-