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LETTRE VIII.

leur double délit, comme parle l’Écriture ? Nous faisons le mal sans comprendre en quoi nous sommes mauvais ; puis, justifiant nos œuvres, nous croyons voir tandis que nous sommes aveugles. Oui, le ciel s’en est étonné, et moi j’en ai frémi et je ne pouvais m’en croire. Si je n’eusse pas lu votre lettre (et pourquoi faut-il qu’elle me soit parvenue !), non, je n’aurais jamais pensé, et nul n’aurait pu me persuader ceci : Démophile n’admet pas que Dieu, si bon envers toutes choses, soit bon envers les hommes, ni que lui-même ait besoin de miséricorde et de salut ! Bien plus, il dégrade les prêtres qui inclinent avec tendresse à supporter les fautes de la multitude ignorante, et savent très-bien qu’ils sont eux-mêmes pleins de faiblesse et d’infirmités !

Comme Démophile est éloigné de la route suivie par le suprême et divin pontife, qui cependant était séparé des pécheurs, selon la parole de l’Écriture[1], et qui manifeste la charité que nous avons pour lui en nous confiant le soin de faire paître ses brebis avec mansuétude ! Au contraire, on nomme méchant le serviteur qui refuse de remettre la dette à son compagnon et de lui appliquer un peu de cette indulgence qu’il avait lui-même si largement éprouvée, et on le condamne à des châtiments mérités[2]. C’est là ce que tous devraient craindre, Démophile et moi. Nous voyons encore qu’en sa passion, le Seigneur demanda pardon pour ses impies bourreaux. Enfin il réprimande ses disciples parce qu’ils réclamaient une trop cruelle vengeance des Samaritains ses persécuteurs[3]. Et votre imprudente lettre répète cent fois, ce dont vous tirez gloire à tort et à travers, que

  1. Hebr., 7, 26.
  2. Luc, 15, 6.
  3. Script., passim.