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Ceci vous prouve qu’on ne doit pas respecter ſi ſcrupuleuſement les penchans du Peuple pourqui l’on écrit, il n’eſt queſtion que de diſtinguer ceux qu’on doit ménager, & ce ſont encore un coup ceux qui ſont utiles aux vuës du Gouvernement, on ne doit pas ſur-tout prêcher le bonheur des Républicains à des peuples aſſujettis à la Monarchie, ni la ſupériorité de puiſſance des Monarchies ſur les Républiques à des Républicains. Les hommes peuvent être ſages ſans ſe croire malheureux, & les ſpectacles deſtinés à leur enſeigner la morale en les amuſant, ne doivent pas ſervir à les faire douter de leur félicité. Un Peuple galant veut de l’amour & de la politeſſe & ce Peuple a raiſon, puis qu’on peut être amoureux, galant & ſage à la fois, c’eſt le comble de la ſageſſe que d’être tendre, aimable & Philoſophe en même tems.

Un homme ſans pasſions ne ſauroit intéreſſer perſonne au Théatre, & l’on a dejà remarqué qu’un Stoicien dans la Tragédie ſeroit un perſonnage inſupportable dans la Comédie, & feroit rire tout au plus.

On a trés mal remarqué ; Glaucias dans Pirrhus, Brutus, Alphonſe dans Inès, Ciceron dans le Triumvirat, Zovire dans Mahomet, & tant d’autres à citer ſont des Stoïciens ou jamais il n’en fut, & l’hiſtoire nous trompe ; dans les Comédies tous nos Ariſtes, un Théodon dans Mélanide, le Héros de la Gouvernante, ces gens là reſſemblent aſſurément au portrait qu’on nous fait des Stoïciens tou-