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bleſſe de Rome s’honnoroit en les repréſentant : en effet devoit on déroger en récitant des Poëmes deſtinés à faire aimer la Vertu ? Les Comédiens François font la même choſe aujourd’hui, ils doivent donc jouir de la conſidération que leur délicateſſe leur a méritée, s’ils ont quitté les farces indécentes pour des Poëmes dictés par la raiſon & la ſageſſe ; on doit donc les traiter en honnêtes gens, & leur rendre les priviléges qu’on accorde dans la ſociété à tous les bons citoiens.

Les Dames Romaines, les jeunes Sénateurs s’oublierent juſqu’à rendre l’hommage le plus éclatant aux Acteurs, ils les conduiſoient comme en triomphe du Théatre à leur logis : on leur faiſoit enfin des honneurs qu’on n’accordoit qu’à peine aux Chefs & aux défenſeurs de la République.

C’étoit un abus qu’il falloit réformer, & qui donna lieu à la publication d’un Édit. Cet Édit n’empêcha pas Ciceron d’eſtimer, d’aimer & de défendre Roſcius, ni les Édiles de le paier ſuivant ſon mérite.

Si les Comédiens avoient été flétris par des réglemens très ſages, lorſque l’indécence l’effronterie, la ſatire & la calomnie empoiſonnoient toutes leurs repréſentations, ils furent eſtimés quand ils ſe contenterent de jouer les ridicules, & de faire haïr les vices en général, ſans attaquer les perſonnes. On porta trop loin l’eſtime qu’on leur accordoit : on réforma cet abus par un Édit : devant comme après on ſe conduiſit ſagement : on n’atta-