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si besoin était, je suis allé, au mois de septembre, passer une nuit avec lui. Il était content et bien portant. C’est un charmant confrère ; soyez remercié mille fois de me l’avoir envoyé. »

Avant que M. Aumaître eût pu rejoindre Mgr Berneux, les tristes prévisions du prélat sur la santé de M. Joanno s’étaient réalisées. Ce jeune missionnaire, d’un zèle constant et éclairé, d’une régularité parfaite, en un mot, comme le disait Mgr Berneux en annonçant sa mort : l’un de ces hommes que Dieu donne aux peuples dans sa miséricorde, s’en alla, le 13 avril 1863, après deux ans de travaux, recevoir au ciel la récompense de ses vertus. Il fut assisté jusqu’à la fin par M. Ridel qui raconte ainsi ses derniers moments : « Je devais terminer mon administration vers le dimanche des Rameaux. M. Joanno se trouvait alors dans un point de son district assez rapproché de ma résidence, et nous nous étions entendus pour nous rencontrer chez moi. Je me disposais à tout préparer pour la fête de Pâques, afin que notre entrevue fût aussi agréable que possible, lorsque je reçus une lettre qui m’apprenait qu’il était à trois lieues de là, très-malade. Je courus aussitôt auprès de lui ; il ne semblait pas excessivement fatigué, et cependant l’état de la poitrine me fit craindre dès lors quelque catastrophe. Nous causâmes assez longtemps ; deux fois, je fus obligé de le quitter pendant quelques heures pour aller administrer des malades, je revenais immédiatement. La veille de Pâques, je le trouvai tellement abattu que je lui donnai l’extrême-onction, et je passai la nuit avec lui. Pendant tout ce temps il ne cessait de prier ; de ses lèvres s’échappaient de fréquentes oraisons jaculatoires, et de chaleureuses aspirations vers son Dieu. Le danger augmentant, je résolus de dire la sainte messe immédiatement après minuit ; il reçut avec une ferveur peu ordinaire la sainte Eucharistie en viatique ; ensuite il s’assoupit, et ne recouvra plus entièrement sa connaissance pendant une longue agonie qui dura neuf jours entiers. Le lundi, 13 avril, vers midi, deux fois il leva les yeux et les bras vers le ciel, et se mit à sourire ; que voyait-il ? Il eut, vers deux heures, une crise très-grave, je récitai les prières des agonisants ; enfin, le soir vers sept heures et demie, il rendit doucement et sans aucun mouvement sa belle âme à Dieu. »

À cette lettre, datée des premiers jours de septembre se trouve joint le post-scriptum suivant : « Je rouvre ma lettre sous l’impression de la plus vive douleur. Notre pauvre mission est cruellement éprouvée. Les ouvriers ne suffisent pas au travail, et ils nous sont enlevés coup sur coup. Que la sainte volonté de Dieu