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Pendant que pleins d’anxiété et de tristesse, les deux évêques de Corée, et leurs courageux compagnons travaillaient à raffermir leur troupeau un instant dispersé, et à cicatriser les plaies de la persécution, des événements étranges se passaient en Chine, événements dont le bruit et le contre-coup ont ébranlé l’extrême Orient tout entier, et dont l’avenir seul pourra faire comprendre toute la portée. Le 13 octobre 1860, les troupes françaises et anglaises entraient victorieuses dans Péking. Les motifs et les détails de ce brillant fait d’armes sont généralement connus : nous nous contenterons de les résumer ici en quelques lignes.

Aux termes de l’article 42 du traité signé à Tien-tsin le 27 juin 1858, les ratifications devaient en être échangées à Péking. En conséquence, au mois de juin suivant, les ambassadeurs de France et d’Angleterre annoncèrent leur départ au commissaire du gouvernement chinois, et quittèrent Chang-haï pour se rendre dans la capitale du Céleste Empire. Tout faisait espérer qu’ils ne rencontreraient aucun obstacle sérieux, et qu’ils seraient reçus à Péking avec politesse, sinon avec bienveillance ; mais on comptait sans la perfidie du gouvernement chinois. L’ambassadeur anglais avait pourtant pris toutes les mesures pour se faire respecter. Une brillante flottille, composée de douze canonnières et de plusieurs autres bâtiments de différentes dimensions, l’accompagnait. La marine française était représentée par les deux vapeurs le Duchayla et le Norzagaray. Quand cette escadre prit son mouillage à l’embouchure du Peï-ho, le 16 juin, l’entrée de la rivière se trouva fermée par une chaîne en fer et une ligne de pieux. Sommé d’ouvrir un passage, le mandarin répondit qu’il avait reçu de l’empereur des ordres formels, et que jamais navire européen ne pourrait pénétrer plus avant.

Quelques jours s’écoulèrent en pourparlers, et pendant tout ce temps on n’apercevait aucun mouvement dans les forts voisins du fleuve. Le silence y était complet, pas une bannière, pas un homme, de sorte qu’on aurait cru ces forts déserts. Enfin, voyant qu’aucun messager n’arrivait de Péking et que la passe demeurait fermée, les ambassadeurs donnèrent, le 25 juin, ordre aux canonnières de s’ouvrir un passage en forçant les estacades. L’amiral Hope se place au premier rang ; la flottille s’avance, brise la chaîne, enlève quelques pieux, arrive à un second barrage qu’elle emporte de même, mais se trouve arrêtée devant un troisième. Pour comble de difficultés, deux ou trois canonnières, ayant touché, sont obligées de reculer un peu pour se dégager. À ce moment un coup de canon retentit, et un boulet tombe sur le