Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/390

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

notre sainte religion, ils attendent le grand jour de la liberté. Dans plusieurs endroits, l’opinion est tellement prononcée en notre faveur, que plusieurs pensent et affirment que le christianisme prendra nécessairement possession de la Corée. À l’appui de leurs pressentiments, ils ne manquent pas de citer plusieurs faits miraculeux arrivés sur divers points du pays.

« Ces heureuses dispositions nous faisaient désirer depuis longtemps une propagande directe parmi les païens ; la prudence de Monseigneur crut devoir s’y opposer. Cependant quelques chrétiens furent envoyés vers les infidèles qui paraissaient présenter moins d’obstacles à la grâce. Le choix de catéchistes capables de remplir une telle mission est fort difficile ; bien peu possèdent les qualités nécessaires pour s’insinuer sans danger dans l’esprit et le cœur des idolâtres. Néanmoins, d’heureuses ouvertures ont été faites : le grain a été semé dans des terres qui promettent des fruits ; dans une de ces expéditions, vingt-cinq païens ont été évangélisés par un seul néophyte.

« De bonnes nouvelles nous arrivent de plusieurs points et nous transmettent bien des faits édifiants Je me contenterai de vous citer un trait de courage d’un de nos catéchumènes. Le frère d’un satellite n’eut pas plutôt connu notre sainte religion, qu’il en embrassa la pratique avec une généreuse ardeur ; son aîné, l’agent du pouvoir, fit jouer tous les ressorts de la ruse pour le faire apostasier : caresses, menaces, injures, tout fut inutile. Furieux et honteux de sa défaite, il s’arme d’un grand couteau, tire son frère à l’écart, lui présente le poignard en lui disant : « Apostasie ou meurs. » Le néophyte, protégé par le bouclier de la foi, découvrant sa poitrine : « Frappe, » dit-il, « mourir pour Dieu est une gloire. » L’aîné demeure interdit, son bras reste suspendu et comme arrêté par une main invisible. À partir de ce jour, il ne revint plus à la charge ; mais sa femme eut connaissance du fait, et voulut absolument connaître une religion qui transforme ainsi les hommes en héros, et les élève au-dessus de toutes les faiblesses de la nature humaine. Elle étudia, elle crut, elle aima. Des obstacles de tout genre l’ont empêchée jusqu’à ce jour de pratiquer ouvertement, mais sa persévérance n’est pas douteuse.

« Vous le voyez, vénérable Supérieur, si Dieu nous visitait par des persécutions plus violentes, la Corée donnerait encore de vaillants soldats, des confesseurs et des martyrs. Réjouissons-nous de ces heureuses dispositions, et demandons au souverain Maître d’envoyer à sa vigne des ouvriers apostoliques selon son