Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/327

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nouveau, chercher la réponse. Seulement je leur répète qu’ayant été clairement avertis de la protection bienveillante que notre empereur accorde à ses sujets, si par la suite une pareille tyrannie s’exerce de la part des Coréens sur quelques-uns d’entre eux, certainement la Corée ne pourra éviter d’éprouver de grands désastres, et quand ces désastres viendront fondre sur le roi, sur ses ministres et les mandarins, qu’ils se gardent bien de les imputer à d’autres qu’à eux-mêmes ; ils seront punis et cela pour s’être montrés cruels, injustes, inhumains. — L’an 1846 du salut du monde, le 8 de la cinquième lune (1er juin). »

« Si l’on vient, écrit à l’occasion de cette lettre Mgr Ferréol, si l’on vient l’année prochaine, et qu’on exige réparation de la mort de nos confrères, il nous est permis d’espérer dans l’avenir une ère moins cruelle pour la religion ; mais si l’on s’en tient à ces menaces, le peuple coréen méprisera les Français, et le roi n’en deviendra que plus furieux contre les chrétiens. Déjà cette lettre a été l’occasion de la mort du P. Kim, ou du moins l’a accélérée. Voici comment. Le P. Kim, ayant gagné l’affection de ses juges et des premiers ministres, ceux-ci prièrent le roi de lui conserver la vie. « Il a commis, lui dirent-ils, un crime digne de mort, en sortant du royaume, et en communiquant avec les étrangers, mais il l’a expié en rentrant dans son pays. » Ils présentèrent ensuite une copie de la mappemonde, traduite par lui dans sa prison. Le roi en fut très-satisfait, et il était sur le point de leur accorder l’objet de leur demande, lorsqu’il reçut la lettre du commandant français. Quelques jours après, ordre fut envoyé de la cour de battre les prisonniers, de relâcher ceux qui auraient apostasié et de mettre, de suite, à mort ceux qui se montreraient rebelles. »

André Kim fut traité en ennemi de l’État, et immolé de la même manière que Mgr Imbert et MM. Chastan et Maubant. Le 16 septembre, une compagnie de soldats, le fusil sur l’épaule, se rendit au lieu de l’exécution, situé sur les bords du fleuve, à une lieue de la capitale. Un instant après, une décharge et le son de la trompette annoncèrent l’arrivée d’un grand mandarin militaire. Pendant ce temps le prisonnier était tiré de sa prison. Une chaise à porteurs avait été grossièrement préparée avec deux longs bâtons, au milieu desquels on avait tressé un siège de paille. On y fit asseoir André les mains attachées derrière le dos, et au milieu d’une foule immense on le conduisit au champ du triomphe.

Les soldats avaient planté dans le sable une pique, au sommet de laquelle flottait un étendard, et s’étaient rangés en cercle tout