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cœur plein de rage, il faut dire adieu au paradis, et quand, tout inondé d’amertume, on descendra aux enfers, quel moyen d’échapper ? À qui désormais demander la vie ? Esclave des horribles démons, et sans cesse au milieu des feux dévorants, quelle effrayante situation ! Depuis longtemps cette peine éternelle m’était bien due à cause de mes péchés. Mais puisque Dieu m’a jusqu’ici conservé la vie, je veux faire en sorte de les détester pour en obtenir le pardon.

« La persécution de cette année est la plus forte qu’il y ait eu en ce pays ; le nombre de ceux qui, par leur mort, ont confessé Dieu et relevé la gloire de l’Église, est si grand, que la religion pourra bien se conserver sans doute, mais combien est languissante la foi des chrétiens qui restent ! Leurs forces sont consumées et comme brisées, ils tremblent, ils apostasient, ils se laissent abattre. Nul remède désormais, disent-ils, et, poussés par la tiédeur et la faiblesse, ils semblent sur le point de redevenir païens. Pourquoi donc se disaient-ils chrétiens ? Dans quel espoir, au milieu d’un pays tel que celui-ci, avaient-ils donc embrassé l’Évangile ?

« De grâce donc, faites vos efforts et employez tous les moyens possibles pour ne pas vous laisser surprendre aux pièges trompeurs des trois ennemis : le monde, la chair et le démon ; mais de tous le plus dangereux, c’est la chair. Soyez assidus à la lecture et à la prière ; sachez saisir le moment propice pour vous livrer à la méditation, et ne la discontinuez pas ; prenez goût au chemin de la croix, et si à chaque station vous réfléchissez avec ferveur, vous y trouverez un profit spirituel immense. On parvient très-difficilement à connaître toutes ses passions, ses affections déréglées, ses vices et ses habitudes, sans l’exercice de la méditation et de la prière. Cependant, si on ne les connaît pas, on ne peut éviter les peines éternelles de l’enfer. Il y a des pensées qui offusquent les yeux de l’esprit, et en même temps lient et fatiguent les forces de l’âme. On se dit par exemple : pour le moment, j’ai trop d’affaires ; pour le moment, il y a des difficultés entre moi et le prochain ; on trouve encore d’autres prétextes qui éloignent de la réception des sacrements. En remettant ainsi de jour en jour, combien sont déjà tombés dans l’abîme ! De grâce, soyez sur vos gardes et réfléchissez-y bien.

« N’oubliez pas surtout d’invoquer la sainte Vierge dont toutes nos paroles ne peuvent exalter les vertus sans bornes. Marie toujours vierge, vous êtes la mère du Fils de Dieu ! Cumulant tous les bonheurs et toutes les vertus, elle brille d’un