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franchement et ouvertement sa religion. Devenu veuf à l’âge de vingt ans, il ne se remaria que pour obéir à ses parents, et sa seconde femme étant morte, il résolut de vivre seul, afin de s’occuper plus librement de son salut. Il allait de côté et d’autre chez les chrétiens, les exhortant, les instruisant, s’occupant de bonnes œuvres, et prêchant les païens dont il convertit un grand nombre. Il subvenait à ses propres besoins et à ses aumônes en copiant des livres de religion. Les missionnaires, pour mieux utiliser son zèle et sa charité, le nommèrent catéchiste. Il sut remplir dignement cet emploi, et, par ses paroles comme par ses exemples, fit beaucoup de bien aux chrétiens. Pendant la persécution de 1839, tantôt à la capitale, tantôt en province, il excitait les tièdes, encourageait les faibles, et se chargeait des affaires les plus difficiles quand l’intérêt de la mission le réclamait. Après son arrestation, le grand juge criminel lui dit : « Si tu veux abandonner cette religion, je te relâcherai immédiatement. — C’est impossible, reprit Étienne, faites ce que vous commande la loi. » On le mit donc à la question, et, pendant ce supplice, les bourreaux lui criaient sans cesse : « Apostasie, et tu seras mis en liberté. » Mais Étienne répondait aussi sans se lasser : « Si vous me relâchez, non-seulement je suivrai encore ma religion, mais je la prêcherai aux autres. » Le juge, furieux, fit prendre la planche à voleurs et dit : a C’est un être digne de mort : frappez sans pitié ! » Et il surveillait lui-même chacun des coups pour exciter les bourreaux. Au trentième coup, voyant bien qu’il ne viendrait pas à bout du patient, il l’envoya à la prison. Là, malgré ses blessures, Étienne se mit à faire des reproches aux apostats, à stimuler le zèle de ceux qui, par amour de la vie, faiblissaient dans leur résolution, et ses efforts furent couronnés d’un succès visible, car plusieurs apostats se rétractèrent. Sans s’inquiéter ni des geôliers ni des satellites, il disait franchement aux chrétiens ce qu’il avait à dire, et semblait se jouer de la mort. Il fut de nouveau mis à la question le lendemain, mais aussi inutilement que la première fois. Le juge, voyant qu’il avait affaire à un homme déterminé, résolut de se débarrasser de lui le plus tôt possible, et après cinq ou six jours de prison, il fut étranglé, le 26 de la douzième lune, à l’âge de cinquante-trois ans.

Parmi les apostats qu’Étienne sut ramener à Dieu, nous citerons Dominique Kim et Côme Nie. Dominique Kim Tsiel-piek-i était du district de Sin-tsiang. Orphelin dès son bas âge, il fut recueilli par un chrétien qui, charmé de ses bonnes dispositions, l’instruisit, le convertit, et plus tard en fit son gendre. Domi-