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CHAPITRE V.

Dernières exécutions. — Lettre du catéchiste Jean Ni. — Fin de la persécution.


À la capitale, après le martyre des missionnaires européens et les nombreuses exécutions du mois de septembre, le gouvernement avait espéré que les chrétiens, frappés de terreur et matés par les souffrances de la vie de prison, se soumettraient facilement. Mais, par la grâce toute-puissante de Dieu, ce calcul fut déjoué ; les défections étaient beaucoup moins nombreuses qu’on ne l’attendait, et les prisons ne désemplissaient guère. Au bout de trois mois, une nouvelle exécution publique fut résolue ; sept des chrétiens déjà condamnés à mort furent désignés pour victimes, et on fixa le jour au 24 de la onzième lune, 29 décembre 1839. Tous les condamnés eussent voulu avoir la préférence, mais plusieurs devaient encore se purifier dans les tribulations avant de cueillir la palme si désirée.

Le chef de cette glorieuse troupe fut Pierre T’soi, frère cadet de Jean T’soi T’siang-hien-i, l’un de nos premiers martyrs de 1801. Pierre Tsoi Ie-t’sin-i était né à Séoul, d’une famille de la classe moyenne qui, jusqu’à l’époque de la première persécution, avait été honorée de diverses fonctions publiques. À la mort de son frère, il n’avait que treize ans et depuis il vécut longtemps sans pratiques religieuses aucunes, et complètement séparé des chrétiens. Peu à peu cependant il se rapprocha d’eux et se convertit solidement vers 1821. Quand le choléra fit de si terribles ravages en Corée, il reçut le baptême, ainsi que beaucoup d’autres catéchumènes, et fut depuis lors un chrétien modèle. D’une admirable humilité, il ne savait voir que le bien chez les autres, et dans sa propre opinion se mettait au-dessous de tous. Le souvenir de sa vie passée pesait toujours sur son cœur, et convaincu que le martyre seul pourrait expier ses fautes, il en concevait un fervent désir.

Sa femme, Madeleine Sen, appartenait aussi à une famille ruinée par la persécution de 1801. Ayant vécu longtemps dans un pays où il n’y avait pas de chrétiens, elle eut beaucoup de peine à acquérir une connaissance suffisante de la religion, mais aussitôt instruite, elle se mit courageusement à la pratique de ses devoirs. Elle fut baptisée avec son mari à l’époque du choléra et