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soldats armés de verges de fer, et ils l’entourèrent en frappant sur lui tous à la fois. Mais Jean était loin d’avoir la pensée de résister ; il se laissa saisir, garrotter et conduire au tribunal de Ouen-tsiou dont dépendait le village. Le juge lui dit : « Est-il vrai que tu suis la mauvaise doctrine ? — Je ne connais pas de mauvaise doctrine, répondit-il, je pratique la religion chrétienne. » On le battit alors violemment pour lui faire indiquer le lieu où sa famille et ses voisins s’étaient retirés, mais il ne prononça pas un mot. Renvoyé à la prison, il fut si cruellement maltraité par les geôliers et leurs valets, qu’il resta étendu sans connaissance. Quand ses plaies furent guéries, on le cita de nouveau au tribunal. Le juge lui dit avec douceur : « Si tu renonces à ta religion, tu deviens un fidèle sujet du roi, et je te fais rendre tous tes biens : mais si tu t’obstines, je vais être forcé de le faire subir de terribles tourments. » Jean répondit : « Quand vous me donneriez tout le district de Ouen-tsiou, je ne puis ni mentir ni renier mon Dieu. » Courageuse parole qui depuis est restée proverbiale dans cette ville, au point que chrétiens et païens, même les enfants, l’emploient dans leurs discussions, comme la plus solennelle affirmation de la vérité. Le juge lui fit administrer plus de cent coups de bâton et le renvoya en prison. Le lundi de Pâques, il fut rappelé et le juge lui dit : « Décidément, tu désires donc mourir ? — La crainte de mourir et le désir de vivre sont des sentiments communs à tous, mais comment pourrais-je refuser de mourir pour la justice ? — Si tu meurs ainsi, où iras-tu donc ? — J’irai au ciel. — Tu ne veux donc pas apostasier ? — Non. » On le fit mettre encore à la torture, que Jean supporta gaiement. Son amour pour Dieu croissait sous les coups.

Il fut ensuite conduit devant le gouverneur. Là, les supplices du bâton, de la planche, de l’écartement des os des bras et des jambes, tout fut mis en œuvre pour lui faire dénoncer des chrétiens, mais en vain. On lui demanda d’expliquer les vérités de la religion, ce qu’il fit avec joie. Son corps était réduit à un état affreux, mais, sans se plaindre, il invoquait le secours de Jésus et de Marie. Deux jours après, nouvel interrogatoire, nouveaux supplices. Il fut battu toute la nuit ; ses chairs tombaient en lambeaux, ses os sortaient de toutes parts, et il avait perdu connaissance. Les bourreaux le traînèrent ainsi dehors, lui enfermèrent les pieds entre deux planches disposées à cet effet, et le suspendirent la tête en bas pendant une demi-journée. Un des valets, touché de compassion, alla le détacher et lui fit avaler un peu d’eau, mais il ne revint à lui que longtemps après, et aussitôt