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Christ mouraient pour sa gloire, ou dans les prisons, ou sur l’échafaud. Ce sont d’abord : Anne Ilan et Barbe Kim, épouses de deux frères. Depuis leur conversion à la religion chrétienne, elles n’avaient cessé de la pratiquer d’une manière exemplaire. On était édifié surtout de l’harmonie parfaite qui régnait entre elles. Elles ne faisaient pas une action, ne prenaient pas une détermination, sans s’être consultées, et jamais une parole un peu aigre ne vint troubler leur heureuse intimité. Affaires temporelles ou soins de l’âme, tout se traitait en commun. Elles s’aidaient de leur mieux, et se facilitaient mutuellement l’occasion d’entendre quelque instruction, dont elles se communiquaient ensuite le sens. Leurs maris étant morts, elles vécurent dans la pauvreté, se soutenant l’une l’autre. Prises ensemble, au commencement de la persécution, elles s’encourageaient dans les supplices, et étaient déterminées à ne pas se quitter. Des tortures violentes, répétées six à sept fois, n’ébranlèrent pas leur constance ; la faim et la soif ne changèrent rien à leur tranquillité d’âme. Leur mort précieuse devant Dieu ne les sépara que pour quelques jours. Barbe Kim, qui avait reçu plus de trois cent quarante coups de bâton, expira le 15 de la septième lune, 24 août, à l’âge de quarante-neuf ans. Cinq jours après, Anne Han, frappée à plusieurs reprises de plus de trois cent quatre-vingt-dix coups, la rejoignit dans la paix du Seigneur, le 20 de la septième lune, 29 août. Elle avait alors cinquante-cinq ans.

Quelques jours après, Lucie Kim, dite la vieille bossue, rendit aussi son âme à Dieu. Infirme dès son enfance, elle avait passé de longues et très-pénibles années avec son mari païen, qui l’empêchait de voir les autres chrétiens, et de pratiquer la religion. À la fin, n’y pouvant plus tenir, elle abandonna son mari et sa maison, et se réfugia chez les chrétiens, allant vivre de côté et d’autre, chez ceux qui voulaient bien la recevoir, se faisant un plaisir de les servir, remplissant avec joie près d’eux les fonctions les plus basses, donnant ses soins aux malades et aux affligés, et édifiant tout le monde par sa ferveur et son humilité. Arrêtée dès le commencement de la persécution, et poursuivie par le juge de mille questions insidieuses, elle persista à répéter qu’elle ne pouvait rien déclarer, et qu’elle était prête à mourir. On la menaça des supplices, mais elle s’en moqua. Son grand âge et ses infirmités la firent épargner, et elle mourut à la prison, à l’âge de soixante et onze ans.

Enfin, à cette même septième lune, dans le district de Hong-tsiou, Dieu appela encore à lui l’âme d’un de ses bons et fidèles