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mariage ayant été retardé, elle eut la constance de souffrir ce martyre pendant trois ans, au bout desquels le futur, ennuyé d’attendre sa guérison, alla se marier ailleurs. Un chrétien, qui connaissait le fond de l’affaire, la demanda bientôt après et elle lui fut accordée. Devenue veuve après deux ans, Barbe s’était retirée d’abord dans sa famille, puis chez sa tante Thérèse Ni, à la capitale. Madeleine, qui avait le désir de garder sa virginité, fortifiée par l’exemple de sa sœur, s’enfuit aussi à la capitale pour échapper au mariage que son père voulait lui faire contracter avec un païen. En quittant son village, elle teignit de sang ses habits, les mit en lambeaux, et les dispersa dans les broussailles pour faire croire qu’elle avait été dévorée par un tigre, et empêcher les recherches. Ses parents prirent le deuil, mais, après trois mois, la mère fut secrètement avertie de tout ce qui s’était passé. Alors le père, voyant sa femme calme et consolée, se douta de quelque chose, la conjura de ne lui rien cacher et de lui dire si leur fille était encore en vie, avec promesse de ne plus les molester à l’avenir. La mère lui ayant rapporté l’histoire, il courut à la capitale et dit à sa fille : « Il me suffit de te voir en vie ; désormais je ne puis plus m’opposer à tes désirs. » Les deux sœurs restèrent donc à la capitale, chez leur tante.

« Vers la fin de mars, leur mère y vint aussi pour recevoir les sacrements, et tous les jours, avec ses deux filles et sa belle-sœur, elles s’excitaient mutuellement à la fidélité envers Dieu et à la persévérance en cas de persécution. Il se trouvait alors, dans la maison de Thérèse Ni, deux autres ferventes chrétiennes qu’elle avait reçues par charité. L’une, nommée Marthe Rim Pou-p’ieng-tsip-i, avait, encore païenne, quitté son mari pour cause de discorde, et s’était remariée à la capitale à un aveugle qui faisait le métier de sorcier. C’est alors qu’elle connut la religion et commença à la pratiquer. Puis, l’aveugle étant mort, elle sortit de la maison, touchée de regrets d’avoir prêté la main à tant de superstitions. Comme elle n’avait aucun moyen d’existence, elle demeurait chez les chrétiens qui voulaient bien la recevoir, travaillant à rendre quelques petits services, toujours gaie et pleine de confiance en Dieu, au milieu des peines et des humiliations. L’autre était Lucie Rim, fille de Pan-moul-tsip-i. À quatorze ans, elle avait fait vœu de virginité, et, ses parents étant morts, elle s’était retirée près des chrétiens, et vivait avec ceux qui lui accordaient l’hospitalité. Ces six femmes se trouvaient donc réunies dans la maison de Thérèse, quand elles entendirent parler du courage et de la grandeur d’âme que les