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effets des trois familles, ce qui leur fut une bonne aubaine, car François Tsio et surtout sa belle-sœur étaient riches.

« Le 25 janvier, j’appris cette affligeante nouvelle, dans la chrétienté de Kattengi, à dix lieues de la capitale. Je me pressai d’en terminer la visite et, sans aller jusqu’à In-tsien, je retournai le 30 janvier à la capitale, tant pour rassurer et encourager les chrétiens épouvantés que pour profiter du nouvel an coréen, époque à laquelle, ici comme en Chine, on jouit de quelque tranquillité de la part des mandarins. Je voulais me presser de faire l’administration des mille chrétiens de Séoul avant que la persécution eût le temps de se propager. Je commençai le premier dimanche de carême, 17 février, et poussai vigoureusement le travail jusqu’au jeudi saint. J’entendis environ cinq cent cinquante confessions dans les divers kong-so ou lieux de réunion. Malgré les précautions que nous prenions, quoique les femmes ne vinssent que la nuit, et se retirassent avant le jour, deux fois les satellites s’aperçurent de nos réunions, et se mirent en faction dans la rue pour observer, mais je partais au chant du coq et tout rentrait dans l’ordre. Jamais je n’ai éprouvé tant de fatigues. À Pâques, je pris quelques jours de repos, tant pour écrire en Chine et faire partir les courriers de Pien-men, que pour éviter la grande affluence qu’aurait amenée la solennité. Il ne restait plus guère à visiter que les chrétiens de deux quartiers, mais les deux kong-so n’existaient plus. Damien Nam eut la charité de prêter sa maison pour une réunion, deux jours avant Quasimodo. J’avais toujours défendu qu’on admît plus de vingt personnes par jour, mais les chrétiens n’étaient pas encore habitués à suivre une règle ; on invita une soixantaine de fidèles pour ces deux jours, et ceux-ci en amenèrent d’autres. D’ailleurs, comme ils ne connaissaient pas la maison, il leur fallait des guides, de sorte qu’il y eut plus de cent personnes réunies le vendredi soir. J’en chassai quelques-uns, mais, le samedi, d’autres arrivèrent plus nombreux ; et les allées et venues ne cessaient pas. Je fus très-fâché ; le pauvre Damien l’était plus encore, cependant il se contint. J’entendis cent quarante-six confessions en deux jours, et le dimanche de Quasimodo je partis avant le jour pour retourner à notre résidence. Là, je célébrai une seconde messe, avant laquelle je reçus la confession de la vieille mandarine Barbe Nam, âgée de quatre-vingts ans, qui profitait de l’absence de son fils pour venir faire ses pâques. Le soir même, la maison de Damien était envahie par les satellites.

« Déjà, le 7 mars, un chrétien, fabricant et marchand de vin, avait été arrêté près du fleuve. Il se nommait Philippe T’soi et