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tous païens, furent destitués, et son frère aîné fut envoyé en exil. Lorsqu’un meurtre a été commis dans un district, le mandarin local ne peut, à lui seul, examiner et décider la cause ; le gouverneur en désigne deux autres qui se réunissent à lui pour faire le procès.

Aucun mandarin ordinaire ne peut, de sa propre autorité, faire exécuter une sentence d’exil ou de mort. Les gouverneurs de province eux-mêmes n’ont ce droit qu’avec certaines restrictions, et presque toujours, quand il s’agit de la peine capitale, ils font d’abord approuver la sentence par le ministre des crimes. Mais, en échange, les juges ne répondent pas d’un coupable qui meurt sous les coups dans les interrogatoires, ce qui est assez fréquent, et souvent ils prennent ce moyen d’en finir le plus vite possible, afin de s’éviter les embarras d’un procès en règle. Ils ont d’autres moyens encore de simplifier les formalités d’une longue procédure. Ainsi, un jour, un jeune domestique s’étant pris de querelle avec le fils d’un noble, le tua d’un coup de cognée dans le bas-ventre. L’assassin fut saisi aussitôt et traîné devant le mandarin. Parmi les témoins, se trouvait le père de la victime. Après quelques questions, le mandarin fit apporter une cognée et, la plaçant dans les mains du père, lui dit en lui désignant le meurtrier garrotté et étendu à terre : « Montre-moi comment cet homme a frappé ton fils. » Son but était de faire tuer le coupable sur place, par le père, et de se débarrasser d’une affaire ennuyeuse. La vengeance étant, en pareil cas, permise par les coutumes du pays, tout eût été terminé de suite. Le père trop timide n’osa point frapper ; les assistants le méprisèrent comme un lâche, et louèrent comme très-juste et très-naturelle la conduite du magistrat.

Les mandarins civils étant à la fois préfets, juges de paix, juges d’instruction, percepteurs, inspecteurs des douanes, des eaux et forêts, de l’enregistrement, de la police, etc., il semble qu’il leur est impossible de suffire à une pareille tâche. Et cependant il n’y a guère de vie plus fainéante et plus inoccupée que celle d’un mandarin. Il passe sa vie à boire, à manger, à fumer, à faire des parties de plaisir. Son tribunal n’est ouvert que trois ou quatre fois par semaine, pendant quelques heures ; et les affaires s’expédient à l’aide de quelques phrases ou de quelques coups de bâton, souvent sans entendre ni les parties intéressées, ni les témoins. Les mandarins militaires agissent d’une manière analogue, et, dans les tribunaux de toute nature, presque tout se fait par les employés subalternes.