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retrouver son fils. Cette affaire pouvait avoir de graves conséquences. On en fit avertir Paul, qui prit le parti de retourner chez lui. Il confia aux chrétiens un livre qu’il avait composé sur la religion, et les divers objets religieux qu’il possédait, et leur fit ses adieux en disant : « Revoyons-nous dans la véritable patrie. » Quand il se présenta à la maison paternelle, son père le reçut d’abord d’un air affable, mais peu de jours après il lui dit : « Pendant que tu n’étais pas ici, beaucoup de personnes sont venues de toutes parts te chercher ; ta réputation en toute espèce de sciences est déjà répandue au loin ; quand on viendra te consulter de nouveau, si tu t’obstines dans cette religion, comment pourras-tu répondre aux questions qui te seront adressées ? Pourquoi rester ainsi entêté ? Je saurai bien te guérir de cette folie ; » et il le battit cruellement. La même scène se répéta les jours suivants. Paul supportait le tout avec patience, sans discontinuer ses pieux exercices ; mais après quelques semaines il tomba gravement malade. Ses forces étaient épuisées, et il était devenu d’une maigreur effrayante.

Environ deux mois se passèrent ainsi, sans que la colère de ce père dénaturé se calmât, et sans que la ferveur et la résignation de Paul eussent en rien diminué. Il était presque à l’agonie quand son père vint le trouver, un couteau à la main, et lui dit : « Tu dois évidemment mourir sous peu ; si tu meurs après avoir apostasié, je te reconnais pour mon fils ; mais si tu refuses d’apostasier, je têtue maintenant avec ce couteau, puis, avec le même couteau, je me donnerai la mort à moi-même. » Paul répondit : « Pour obéir à un père, on ne peut transgresser les ordres du roi ; à plus forte raison, Dieu étant le souverain roi de tout l’univers et le père de tous les hommes, récompensant le bien et punissant le mal, devons-nous lui obéir malgré tout. Vous voulez me forcer à le renier, est-ce là le devoir d’un père ? » Il n’avait pas achevé, que son père, exaspéré, se précipite et veut le percer de son couteau ; mais la mère et les frères de Paul s’élancent sur lui et le retiennent. Ne pouvant se débarrasser d’eux et atteindre son fils, il veut se couper la gorge. On l’en empêche également. Cependant, Paul disait avec beaucoup de douceur : « Mon père, quoique vous en veniez à ces excès, je ne puis, pour suivre vos ordres, enfreindre les commandements de notre père céleste. »

Le lendemain, dès le matin, Paul se livra selon sa coutume à la prière et à la méditation. Pendant la matinée, il demandait fréquemment s’il était midi, et ce temps arrivé, il récita dévotement