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tong à la cinquième lune, déposa chez un geôlier le petit paquet qu’il portait, et voulut se présenter devant le juge criminel. Le portier du tribunal l’en empêcha, mais Ambroise répondit : « Je suis chrétien ; allez avertir le juge que je suis là. » Les satellites le traitaient d’insensé et le repoussaient ; mais il cria à haute voix : « Je ne suis pas un insensé, mais bien un chrétien.» On dut donc avertir le juge, qui le fit venir et lui adressa quelques questions. Ambroise refusa de répondre sur le lieu de sa demeure et sur l’endroit où étaient cachés ses livres, reçut une volée de coups sur les jambes et fut mis en prison. Un mois plus tard, il fut envoyé à Tai-kou où se trouvaient les autres confesseurs, tous ses amis intimes. Devant le gouverneur, il reçut par trois fois de violentes bastonnades, et fut soumis à diverses tortures, qu’il supporta avec une patience inébranlable. À la fin il fut condamné à mort, et laissé en prison en attendant la confirmation de la sentence.

À cette même époque se trouvait, par hasard, dans le voisinage de Tai-kou, un bonze très-fameux dans la province, et qui s’était même coupé par dévotion quatre doigts de la main. Le juge eut l’idée de commander à Paul Pak de discuter avec ce bonze la vérité ou la fausseté de leurs doctrines respectives. À cette nouvelle, tous les chrétiens prisonniers furent fort inquiets. Paul leur dit : « Sans études comme je le suis, comment pourrais-je lui tenir tête par mes propres forces ? Mais si je compte uniquement sur le secours de Dieu et de sa sainte Mère, qu’y a-t-il à craindre, et pourquoi vous inquiéter ? Priez seulement pour moi. » Arrivé au tribunal et lorsque la discussion allait commencer, les prétoriens voyant que les forces de Paul étaient épuisées, lui offrirent une tasse de vin qu’il accepta avec reconnaissance. Après l’avoir bue, il se mit à raisonner avec le bonze. On était à peine entré en matière que celui-ci, perdant le fil de son discours, resta sans réponse, fut obligé de s’avouer vaincu, et, tout couvert de honte, voulut prendre la fuite. En vain les mandarins, les prétoriens, les satellites, tous humiliés et furieux, voulurent ranimer leur champion ; ils ne purent le décider à proférer une seule parole, et finirent par le chasser ignominieusement. Paul rendit grâces à Dieu de la victoire qu’il lui avait accordée, et pendant qu’il retournait à sa prison, les satellites le louaient, l’exaltaient, le félicitaient grandement, et se disaient entre eux : « La religion du Dieu du Ciel est certainement une doctrine vraie. Quant aux bonzes sectateurs de Fô, qu’on en empoigne seulement deux ou trois et qu’on leur fasse subir les tourments qu’on inflige aux