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salue ces morts comme s’ils étaient vivants, on offre de la nourriture devant les tablettes dans lesquelles leurs âmes sont supposées résider, et il y a pour leur service des eunuques et des filles du palais en grand nombre, le tout organisé sur le même pied, et d’après les mêmes règles que dans les palais ordinaires.

En Corée, où la religion ne consiste guère que dans le culte des ancêtres, tout ce qui concerne les funérailles des rois est d’une importance extraordinaire, et la cérémonie de leur enterrement est la plus grandiose qu’il y ait dans le pays. Le roi étant considéré comme le père du peuple, tout le monde sans exception doit porter son deuil pendant vingt-sept mois. Ce temps se partage en deux périodes bien distinctes. La première, depuis le moment de la mort jusqu’à celui de l’enterrement, dure cinq mois. C’est l’époque du deuil strict. Alors, tous les sacrifices des particuliers doivent cesser dans toute l’étendue du royaume, les cérémonies des mariages sont interdites, aucun enterrement ne peut avoir lieu, il est défendu de tuer des animaux et de manger de la viande, défendu aussi de fustiger les criminels ou de les mettre à mort. Ces règles sont, en général, scrupuleusement observées ; cependant il y a quelques exceptions. Ainsi, les indigents de la dernière classe du peuple ne pouvant conserver leurs morts dans les maisons pendant un temps aussi considérable, on tolère qu’ils fassent leurs enterrements sans bruit et en secret ; mais l’usage est sacré pour tous les autres. De même, à la mort du dernier roi, à cause des chaleurs intolérables de l’été et de la nécessité de vaquer aux travaux des champs, son successeur donna une dispense générale de l’abstinence.

Outre ces dispositions spéciales à la première période de deuil, il y en a d’autres qui s’appliquent à la fois et aux cinq mois qui précèdent l’enterrement et aux vingt-deux qui le suivent. Un ordre du gouvernement désigne quels habits on doit porter. Toute couleur voyante, toute étoffe précieuse, est sévèrement interdite. Chapeau blanc, ceinture, guêtres, habits, chemises, etc., en toile de chanvre écrue, tel est, sous peine d’amende et de prison, le costume de tous, jusqu’à ce qu’une nouvelle ordonnance ministérielle permette de reprendre les vêtements ordinaires. Les femmes cependant ne sont pas soumises à ces règlements, parce qu’elles ne comptent absolument pour rien aux yeux de la loi civile et religieuse ; d’ailleurs la plupart restent presque toujours enfermées dans l’intérieur des maisons. Pendant tout le temps du deuil, les réjouissances publiques, les