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fois même par la mort. Ces sérails sont, on le pense bien, le théâtre de désordres et de crimes inouïs, et c’est un fait public que ces malheureuses servent aux passions des princes, et que leur demeure est un repaire de toutes les infamies.

Les eunuques du palais forment un corps à part ; ils subissent des examens spéciaux, et d’après leur science ou leur adresse, avancent plus ou moins dans les dignités qui leur sont propres. On prétend qu’ils sont généralement d’un esprit étroit, d’un caractère violent et irascible. Fiers de leurs rapports familiers et quotidiens avec le souverain, ils s’attaquent à tous les dignitaires avec une insolence sans égale, et ne craignent pas d’injurier même le premier ministre, ce que nul autre ne ferait impunément. Ils n’ont guère de relations qu’entre eux, car tous, nobles et gens du peuple, les craignent autant qu’ils les méprisent. Chose étrange ! tous ces eunuques sont mariés, et beaucoup d’entre eux ont plusieurs femmes. Ce sont de pauvres filles du peuple qu’ils enlèvent par ruse ou par violence, ou qu’ils achètent à un assez haut prix. Elles sont enfermées plus strictement encore que les femmes nobles, et gardées avec une telle jalousie, que souvent leur maison est interdite aux personnes de leur sexe, même à leurs parentes. N’ayant point d’enfants, ces eunuques font chercher dans tout le pays, par leurs émissaires, les enfants et les jeunes gens eunuques ; ils les adoptent, les instruisent, et les mettent sur les rangs pour les principaux emplois de l’intérieur du palais. Mais où trouve-t-on ces eunuques ? Un certain nombre le sont de naissance ; on les estime moins que les autres, et quelquefois, après examen, ils sont rejetés. D’un autre côté, il ne paraît pas que l’usage barbare de la mutilation, de main d’homme, existe dans ce pays ; les missionnaires n’en ont jamais entendu citer un seul cas. Mais il arrive, de temps en temps, que les petits enfants sont estropiés par les chiens. En Corée, comme dans quelques autres contrées de l’Orient, les chiens sont seuls chargés des soins nécessaires de propreté auprès des enfants à la mamelle, c’est-à-dire jusqu’à l’âge de trois ou quatre ans, et les accidents du genre dont nous parlons ne sont pas rares. Ces enfants devenus grands trouvent, dans leur infirmité, une ressource et un moyen de vivre. Quelquefois même, s’ils arrivent à une position un peu élevée, ils viennent en aide à leurs familles.

Outre les palais habités par le roi, il y en a d’autres destinés exclusivement aux tablettes de ses ancêtres. On y fait exactement le même service que dans les premiers ; chaque jour on