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Que le lecteur nous pardonne d’avoir cité tout au long ce fatras indigeste et stupide. Telle qu’elle est, cette pièce est une des plus importantes de notre histoire, non-seulement parce que les Coréens y voient un chef-d’œuvre de style, et une réfutation sans réplique de la religion chrétienne, mais, ce qui est beaucoup plus grave, parce qu’elle est devenue loi fondamentale de l’État, parce qu’elle a fixé la législation contre les chrétiens, et qu’il est presque impossible, sans une révolution complète à l’intérieur, ou sans une pression extérieure suffisante, qu’elle soit jamais rapportée. Cette loi de proscription est appliquée avec plus ou moins de rigueur selon les circonstances, mais elle existe toujours, et chacune des persécutions que nous aurons à raconter a été motivée par elle. De plus, les Coréens, comme tous les Asiatiques, ou, pour parler plus juste, comme tous les peuples païens d’autrefois et d’aujourd’hui, confondant invinciblement ce qui est de l’ordre politique et ce qui est de l’ordre religieux, la croyance que le christianisme est par essence hostile à l’état, aussi bien qu’à la religion nationale, est devenue un article de foi. C’est ce préjugé, maintenant enraciné, qui s’oppose le plus à la propagation de l’Évangile.

Nous ne perdrons pas le temps à réfuter les accusations de toute nature accumulées ici contre les chrétiens, mais il est bon de constater la ressemblance ou plutôt l’identité des calomnies, que tous les persécuteurs, depuis les empereurs païens de Rome jusqu’aux princes de la Chine, du Tong-king, ou de la Corée, ont toujours mises en avant pour justifier leur cruauté. Toujours il est question de magie, de sorcellerie, de mystères cachés, de débauche, de violation des lois de la nature, etc… Et cependant la régente de Corée et ses ministres ne songeaient certes guère à copier les décrets de Néron ou de Dioclétien ; mais, comme ceux-ci, ils écrivaient sous la dictée du même esprit de mensonge, qui de tout temps s’est servi, et de tout temps se servira des mêmes armes contre Dieu et son Église.


La proclamation officielle fut envoyée à tous les gouverneurs de province, de façon à être publiée le jour du nouvel an ; et en même temps ordre fut donné aux tribunaux d’exécuter immédiatement les sentences déjà rendues, de terminer en toute hâte, avant la fin de l’année, les procès de chrétiens encore pendants, et de ne plus commencer de nouvelles poursuites. En conséquence, deux exécutions eurent lieu coup sur coup, à la capitale ; l’une le 26 de la douzième lune (29 janvier 1802) ; l’autre deux