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ment que plus de la moitié des individus ne connaissent pas leurs véritables parents. Plusieurs fois des chrétiennes, sur le point d’être violées par des païens, les ont arrêtes par ces paroles : « Ne m’approche point, je suis ta propre fille. » Et le païen reculait, sachant que le fait était, sinon probable, au moins très-possible. Au reste, comment pourrait-il en être autrement dans un pays où aucun frein religieux ne vient dominer les passions, et où les coutumes, les nécessites même de la vie matérielle forcent souvent les pauvres, c’est-à-dire la moitié de la population, à oublier les lois de la pudeur ? En effet, les maisons des pauvres ne sont que de misérables huttes de terre. Ils n’ont pas le moyen d’avoir deux chambres, ou, s’ils en ont deux, ils ne peuvent les chauffer toutes deux pendant l’hiver. Aussi, père, mère, frères et sœurs, tous dorment ensemble, sous la même couverture s’ils en ont une, et, s’ils n’en ont point, serrés les uns contre les autres pour se réchauffer un peu.

Presque tous les enfants jusqu’à l’âge de neuf ou dix ans, quelquefois même davantage, vivent pendant l’été absolument nus, ou revêtus seulement d’une petite jaquette qui descend jusqu’à la ceinture. Les enfants chrétiens sont généralement vêtus d’une manière plus décente, mais les missionnaires ont eu beaucoup de peine à obtenir cette concession. Tout homme, marié ou non, est libre d’avoir chez lui autant de concubines qu’il peut en entretenir. Quand une femme arrive dans un village, elle trouve toujours où se placer ; si nul n’est assez riche pour la garder chez lui, chacun la prend dans sa maison à tour de rôle, et la nourrit pendant quelques jours. Une femme qui, voyageant seule, passerait la nuit dans une auberge, serait infailliblement la proie du premier venu ; quelquefois même la compagnie d’un homme, à moins qu’il ne soit bien armé, ne suffit pas à la protéger. Inutile d’ajouter que la prostitution s’étale partout au grand jour, et que la sodomie et autres crimes contre nature sont assez fréquents. Le long des routes, à l’entrée des villages surtout, les filles publiques de bas étage s’installent avec une bouteille d’eau-de-vie de riz, dont elles offrent aux voyageurs. La plupart s’arrêtent d’eux-mêmes pour les faire chanter, ou badiner avec elles ; et si quelqu’un passe sans les regarder, elles ne se gênent nullement pour l’arrêter par ses habits et même lui barrer le chemin.

Mais détournons les yeux de ce triste spectacle, et hâtons-nous de passer à un autre sujet.

Les Coréens ont généralement le caractère entier, difficile,