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pleine décadence. Avant la dynastie actuelle, le bouddha coréen, quelquefois appelé Sekael (issu de la famille de Se), était en très-grand honneur, ainsi que ses bonzes. C’est alors que furent bâties toutes les grandes pagodes dont quelques-unes existent encore aujourd’hui. On en trouvait dans chaque district, et les largesses du peuple et des rois les entretenaient dans la prospérité. Quand les dons volontaires étaient insuffisants, le trésor public y pourvoyait. Plusieurs rois de la dynastie Korie voulurent, par dévotion, être inhumés dans ces pagodes, à la manière bouddhique, qui consiste à brûler les corps et à recueillir les cendres dans un vase, que l’on conserve en un lieu spécial, ou que l’on jette à l’eau. Un de ces rois fit même un décret pour obliger chaque famille qui aurait trois enfants, à en donner un pour devenir bonze. À la fin du quatorzième siècle, la nouvelle dynastie qui s’installa sur le trône de Corée, sans prohiber en aucune manière le bouddhisme, le laissa complètement de côté, et depuis cette époque, pagodes, bonzes et bonzesses, n’ont cessé de déchoir dans la vénération publique. Quelquefois encore, même aujourd’hui, le gouvernement invoquera officiellement le nom de Fô, et les reines ou princesses feront, dans des circonstances particulières, un petit présent à telle ou telle pagode, mais rien de plus, et tout le monde, les bouddhistes eux-mêmes, avouent que, dans quelques générations, il ne restera de leur culte qu’un souvenir.

Les pagodes bouddhiques, bâties dans le genre chinois, n’ont généralement rien de remarquable. Le sanctuaire où se trouve la statue de Fô est assez étroit, mais il est toujours entouré de nombreux appartements qui servent aux bonzes de demeure, de salles d’étude et de lieux de réunion. Du plus grand nombre, il ne reste que des ruines. Ces pagodes sont d’ordinaire situées dans les montagnes, dans les déserts, et souvent le site en est admirablement choisi. Pendant l’été surtout, les lettrés s’y réunissent souvent pour se livrer à l’étude et aux discussions littéraires. Ils y trouvent la tranquillité, la solitude, le bon air ; et les bonzes, moyennant une légère rétribution, leur servent de domestiques.

Ces bonzes sont maintenant presque sans ressources. Excepté dans la province de Kieng-sang, où ils ont conservé quelque influence, ils sont obligés, pour vivre, de mendier ou de se livrer à divers travaux manuels, tels que la fabrication du papier ou des souliers. Quelques-uns cultivent de petits coins de terre appartenant aux bonzeries. Par suite du discrédit où est tombée leur