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malencontreuse idée de prendre son chapeau ou d’ouvrir son parapluie, on lui arrache ces objets que l’on met en pièces, et on l’accable lui-même de coups et d’injures.

Le mandarin après le sacrifice duquel la pluie arrive, est regardé comme ayant bien mérité de la patrie, et le roi le récompense en lui donnant de l’avancement, ou en lui faisant quelque cadeau précieux. Il y a quelques années, un mandarin de la capitale, pour avoir fait la cérémonie avant l’heure fixée, fut immédiatement destitué. Mais cette nuit-là même, la pluie commença à tomber ; il fut rétabli dans sa charge, et partagea la récompense avec le mandarin du jour suivant, pendant le sacrifice duquel la pluie tomba en grande abondance. Chacun d’eux reçut du roi une peau de cerf, qui fut portée à leur domicile avec tout l’appareil et toute la pompe possibles.

Les sacrifices pour obtenir le beau temps se font, à la capitale, sur la grande porte du Midi. L’heure est la même, le sacrificateur garde la même abstinence, et pendant tout le temps que durent ces sacrifices la porte reste fermée jour et nuit, et la circulation est arrêtée. Quelquefois aussi on interdit, pendant ce temps, de transporter les morts. Ceux qui alors font la levée du corps et se mettent en route, malgré la défense, soit parce qu’ils l’ignorent, soit parce qu’ils espèrent passer en contrebande, soit enfin parce que le jour du convoi a été fixé par les devins et ne peut être changé, sont impitoyablement arrêtés aux portes de la ville. Comme ils ne peuvent retourner chez eux avant l’enterrement, ils doivent demeurer à la pluie, eux et les cercueils qu’ils portent, souvent pendant plusieurs jours, jusqu’à ce que le retour de la sérénité fasse lever la prohibition.

Quelquefois, dans les grandes calamités, comme au temps du choléra, les particuliers se cotisent ou font des quêtes pour fournir aux frais de sacrifices plus nombreux, et le roi, de son côté, cherche à apaiser le courroux du ciel en accordant des amnisties partielles ou générales.

Outre ce culte officiel du Siang-tiei ou du ciel, le gouvernement entretient à la capitale un temple et fait offrir régulièrement des sacrifices au Sia-tsik. « J’ai souvent demandé, écrit Mgr Daveluy, ce qu’est ce Sia-tsik. Les réponses sont fort obscures. La plupart prétendent que Sia est le génie de la terre, et Tsik l’inventeur de l’agriculture en Chine, placé aujourd’hui parmi les génies tutélaires. Quoi qu’il en soit, le peuple ne s’occupe guère du Sia-tsik, et dans les provinces, on ignore et son nom et son culte. Mais, à la capitale, son temple est ce qu’il y a de plus sacré ;