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L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

l’andante et surtout dans le final ; quant au troisième, en si mineur, dont les développements sont d’une tenue plus serrée que ceux des trios précédents, je ne puis en conscience le mettre, au point de vue des idées, en parallèle avec celui que je viens d’analyser. Le final, composé bien postérieurement aux autres morceaux (j’en dirai plus bas la raison), présente seul, en son esprit très beethovénien, de curieuses alternances rythmiques et d’ingénieuses combinaisons.

Le quatrième trio (op. 2), également en si mineur, dédié à son ami Fr. Liszt et propriété pour la France de l’éditeur Schlésinger, a une histoire qui nous fut souvent contée par notre maître.

C’était en 1842 ; le jeune Franck, forcé, ainsi qu’on l’a vu dans le premier chapitre de cette étude, de quitter le Conservatoire de Paris, était à Bruxelles, où Liszt, alors dans la plénitude de sa géniale virtuosité, émerveillait les salons et entraînait à sa suite tous les cœurs féminins. Le grand artiste qui, toute sa vie (rare vertu dans le monde de l’art), se montra d’une bienveillance extrême pour ses confrères, surtout pour ceux qui lui paraissaient doués d’un réel sentiment artistique, ne dédaigna point d’accueillir avec une amicale affabilité le jeune compositeur