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LE CAPITAINE

Un brusque étonnement mêlé d’inquiétude, de raillerie, de pitié, d’effroi, saisit soudain le Gascon. Penché sur sa maîtresse, il la pénétra d’un regard aigu, à fond d’âme, et y vit dans l’éloignement, légère comme la lueur d’un mystique autel, une pensée qu’il n’osa lire. — Je vous obéirai, dit-il au bout d’un instant ; ces drapeaux vont venir, mais n’y touchez point, car ils appartiennent au pays. D’ailleurs, je veillerai, j’ai cent yeux autour de la tête comme Argus le vacher de Junon ; prenez garde. — D’Aubeterre ! héla-t-il. (Un gentilhomme parut) Apportez-moi ici les étendards de Coutras. (L’officier inclina la tête, sortit) — Madame, murmura le Gascon, vous avez vu la honte de ce gentilhomme, vous porterez ce sourire triste dans vos remords, Plus un mot.

Ils s’assirent. Le roi sombre regardait la nuit. Madame de Gramont, à l’autre bout de la table, semblait ne rester vivante que par l’attention immobile, presque farouche, qu’elle prêtait aux plus légers bruits du dehors. Après un quart d’heure d’attente, du fond de la cour noire, un vigoureux ban de tambourins les fit tressaillir ensemble, M. d’Aubeterre, sans ordres, malgré qu’il fût dans les ténèbres seul avec trois soldats, procédait aux cérémonies en usage pour la remise des drapeaux. On entendit son pas. La porte s’auvrit sur un froissement blanc gigantesque. Le gentilhomme silencieux déposa les haillons sacrés