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à un certain point de vue. Mais disons aussi que ce que l’on savait de plus n’était pas généralement répandu ni admis : c’était des observations particulières et locales, ou bien des vues théoriques publiées à l’étranger, dans de petits centres scientifiques qu’elles ne dépassaient guère et où souvent même, comme nous l’avons vu, elles étaient loin d’être appréciées à leur juste valeur.

Si l’on doit regretter que Buffon n’ait pas été en possession de toutes les données acquises qui eussent certainement modifié ses opinions à beaucoup d’égards, il ne faut pas perdre de vue les difficultés et la lenteur des relations littéraires à l’époque où il écrivait comparée à la nôtre. Son œuvre, pour être moins parfaite, est toujours un travail d’une haute portée et digne de la plus profonde estime, parce qu’il dépasse de beaucoup tout ce qui avait été encore fait dans cette direction.

Buffon ne devait pas être jugé très-favorablement par les étrangers, la nature de son talent littéraire exigeant une profonde connaissance de la langue pour être appréciée, et la forme d’un ouvrage étant ce dont beaucoup de savants se préoccupent le moins. On a vu l’extrême partialité de de Luc à son égard ; quant à de Saussure, il n’en parle presque nulle part, ce qui se conçoit par suite de son caractère exclusivement observateur, tandis que pour de Luc, qui bâtissait sans cesse sur des hypothèses, on serait tenté de croire à une jalousie de métier. Plus récemment, en Angleterre, Conybeare[1], esprit moins prévenu, mais essentiellement pratique, en parle ainsi : « Quoique le génie splendide de Buffon, dit-il, ait vainement épuisé ses forces dans la recherche de spéculations théoriques, et peu ou point ajouté à la masse réelle des faits résultant de l’observation directe, cependant on doit reconnaître que par l’éclat même de ses idées et peut-être aussi par leur étrangeté, il a beaucoup contribué à attirer plus généralement l’attention sur cette branche des études philosophiques. »

  1. Outlines of the geology of England and Wales, introduction, p. xlii, in-8. Londres, 1822.