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vrage que vous lui avez envoyé. Il est mieux à présent, mais encore bien faible ; et il m’a chargé de vous réitérer ses remerciements, et de vous dire que l’Académie recevrait, avec grand plaisir, l’exemplaire que vous lui destinez.

Je vous félicite d’avoir eu M. de Rochefort dans votre solitude pendant quelques jours ; c’est un très galant homme, fort instruit, et ami zélé de la philosophie et des lettres.

Le roi de Danemarck ne m’a presque parlé que de vous dans la conversation de deux minutes que j’ai eu l’honneur d’avoir avec lui : je vous assure qu’il aurait mieux aimé vous voir à Paris que toutes les fêtes dont on l’a accablé. J’ai fait à l’Académie des sciences, le jour qu’il est venu, un discours dont tous mes confrères et le public m’ont paru fort contents ; j’y ai parlé de la philosophie et des lettres avec la dignité convenable ; le roi m’en a remercié ; mais les ennemis de la philosophie et des lettres ont fait la mine ; je vous laisse à penser si je m’en soucie.

J’ignore les intrigues de La Bletterie, et je les méprise autant que sa traduction et sa personne. Je ne vous mande rien de toutes les sottises qui se font et qui se disent ; vous les savez sans doute par d’autres, et sûrement vous en pensez comme moi. J’ai lu, il y a quelques jours, une brochure intitulée l’A, B, C ; j’ai été charmé surtout de ce qu’on y dit sur la guerre et sur la liberté naturelle. Adieu, mon cher et ancien ami ; pensez quelquefois, dans votre retraite, à un confrère qui vous aime de tout son cœur, et qui vous embrasse de même.


Paris, 2 janvier 1769.


Je ne suis plus enrhumé, mon cher maître, mais je me sers d’un scribe pour ménager mes yeux qui sont très faibles aux lumières. Je vous envoie mon discours, puisque vous lui faites l’honneur de vouloir le lire. Je vous l’ai fait attendre quelques jours, et beaucoup plus longtemps qu’il ne mérite, parce qu’il était à courir le monde, et que je n’ai pu le ravoir qu’aujourd’hui ; voulez-vous bien me le renvoyer sous l’enveloppe de Marin ? Il n’est que trop vrai qu’un certain gentilhomme a tenu au roi de Danemarck le ridicule propos qu’on vous a dit. Vous verrez dans mon discours un petit mot de correction fraternelle pour ce gentilhomme qui était présent, et qui, à ce que je crois, l’aura sentie ; car je ne gâte pas ces messieurs. Vous voyez, mon cher ami, ce qui en arrive quand on les flatte ; ils trouvent mauvais qu’on se moque des plats auteurs qu’ils protègent ; on s’expose à de tels reproches quand on ca-