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Les travaux sont cessés, et la gerbe étonnée
Reste sur la faucille à demi moissonnée :
Tel qu’un torrent grossi par des torrents nouveaux,
Qui des rocs à grand bruit précipite ses flots,
On en vit accourir des sommets helvétiques,
Des hauteurs du Jura, de ces bords poétiques
Où Voltaire sema les vers et les bienfaits,
Que n’ont point oublié les enfants de Cérès.
Eh ! qui n’a point connu les accords de Voltaire !
Le fils dans le berceau les apprit de sa mère,
Chaque sexe, chaque âge en modulait les sons,
Et tous s’embellissaient de l’éclat de ses dons.

Grossis à chaque instant d’une foule nouvelle,
Ils guidaient vers Paris leur marche solemnelle.
Ah ! lorsqu’on vit de loin flotter leurs étendards
Quelle joie enivra cette ville des arts !
Des portes à l’instant, l’œil de larmes humide,
Coururent les amis, les compagnons d’Alcide,
Ses antiques parents et ses fameux rivaux,
Dès l’enfance témoins de ses nombreux travaux ;
Près d’eux un tendre essaim de beautés virginales,
Le front ceint de lauriers, sous le lin des vestales
Étendaient vers le char leurs innocentes mains,
Et de fleurs en marchant parfumaient les chemins :
Là, tout près de ta nièce, ô sublime Corneille,
Brillait cette orpheline, adoptive merveille,
Que Voltaire accueillit au matin de ses ans,
Et dota de vertus, de grâce et de talents.
Ô quelle douce joie humecta sa paupière
Alors qu’elle aperçut son bienfaiteur, son père,