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On sait que les Métamorphoses du Vampire figuraient parmi les pièces condamnées.

À défaut de l’image du vampire, la femme perverse et câline amène en général l’image, plus banale, du tigre ou de la panthère. Ainsi dans les Bijoux :

Les yeux fixés sur moi comme un tigre dompté.
D’un œil vague et rêveur elle essayait des poses ;

dans le Léthé :

Viens sur mon cœur, âme cruelle et sourde,
Tigre dompté

et dans un sonnet des Poésies posthumes :

Tes yeux noirs flamboyants de panthère amoureuse…

Pourtant il est une image plus particulière à Baudelaire et qui, à ses yeux, ne peint pas seulement la perversité de la femme, mais aussi sa musicale souplesse, c’est l’image du serpent. Oui, je crois bien que le poète a tiré de cette image, vieille elle aussi, une telle richesse de sens et, pour ainsi dire, tant d’« harmoniques », qu’elle lui appartient presque en propriété. Flexibilité, balancement, grâce et perversité : ici tout l’a séduit, ici tout l’a hanté, car son imagination entraînée vers l’Orient voyait avant tout dans le serpent l’animal que les jongleurs de l’Inde exercent à danser au son des instruments pour les exhiber devant les temples. C’est ce qui explique les vers :