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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

de plus criminel, en effet, dans un orateur, que de parler contre ses propres sentimens ! Telle est toutefois la conduite que vous avez tenue.

Après cela, vous parlez encore, et vous regardez en face vos compatriotes ! Croyez-vous donc qu’ils ne sachent pas qui vous êtes ? ou que le sommeil et l’oubli se soient emparés d’eux, au point qu’ils ne se souviennent pas des discours que vous leur débitiez dans cette tribune, protestant, avec serment et imprécation sur vous-même, qu’il n’y avait aucune liaison entre vous et Philippe ; que la haine seule, et non la vérité, me portait à vous faire ce reproche ? Cependant, à la première nouvelle de la défaite, oubliant toutes vos protestations et levant le masque, vous vous disiez l’hôte et l’ami de ce prince, noms dont vous décoriez vos criminels trafics. En effet, à quel titre réel ou légitime, Eschine, fils de Glaucothée la musicienne, aurait-il été l’hôte, l’ami, ou simplement connu de Philippe, roi de Macédoine ? Pour moi, je ne le vois pas ; mais je vois que vous vous êtes vendu à ce monarque, pour trahir vos concitoyens. Convaincu de trahison, et dans l’esprit de tout le monde, et par le témoignage de votre conduite, vous m’accablez d’injures, vous me reprochez des malheurs dont il faudrait m’accuser moins que tout autre.

C’est d’après mes conseils, Eschine, que la république résolut et qu’elle exécuta de grandes choses : voici la preuve qu’elle ne l’avait pas oublié. Lorsque,