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notre sang, mais dont la fin ne peut être que très dangereuse, quoi qu’elle soit très incertaine : que nous vous demandons grâce ou plutôt justice, que nous avons accoutumé de la demander à Dieu, quand les puissances du monde nous la refusent et que c’est lui qui juge aussi bien les Souverains que les Peuples. — D. B.


III. — Lettre contre les Frondeurs


À Monsieur D. L. M. L. V. L. F.
(de La Mothe Le Vayer le Fils)


Messieurs, il est vrai, je suis Mazarin, ce n’est ni la crainte, ni l’espérance qui me le font dire avec tant d’ingénuité, c’est le plaisir que me donne une vérité, quand je la prononce. J’aime à la faire éclater, sinon autant que je le puis, du moins autant que je l’ose ; et suis tellement antipathique avec son adversaire, que pour donner un juste démenti, je reviendrois de bon cœur de l’autre monde. La Nature s’est si peu souciée de me faire bon Courtisan, qu’elle ne m’a donné qu’une langue pour mon cœur et pour ma fortune. Si j’avois brigué les applaudissements de Paris, ou prétendu à la réputation d’éloquent, j’aurois écrit en faveur de la Fronde, à cause qu’il n’y a rien qu’on persuade plus aisément au peuple, que ce qu’il est bien aise de croire ; mais comme il n’y a rien aussi qui marque davantage une âme vulgaire, que de penser comme le vulgaire, je fais tout mon possible pour résister à la rapidité du torrent, et ne me pas laisser emporter à la foule ; et pour commencer je vous déclare encore une fois que je suis Mazarin ; je ne suis pourtant pas si déraisonnable, que