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monde d’où je venois, à cause qu’ayant accoutumé d’aboyer à la Lune (139), ils sentoient que j’en venois, et que j’en avois l’odeur, comme ceux qui conservent une espèce de relan ou air marin, quelque temps après être descendus de sur la mer. Pour me purger de ce mauvais air, je m’exposai sur une terrasse, durant trois ou quatre heures au Soleil : après quoi je descendis, et les chiens qui ne sentoient plus l’influence qui m’avoit fait leur ennemi, ne m’aboyèrent plus, et s’en retournèrent chacun chez soi. Le lendemain je partis pour Rome, où je vis les restes des triomphes de quelques Grands Hommes, de même que ceux des siècles : j’en admirai les belles ruines, et les belles réparations qu’y ont faites les Modernes. Enfin après y être demeuré quinze jours en la compagnie de M. de Cyrano (140), mon Cousin, qui me prêta de l’argent pour mon retour, j’allai à Civita-Vecchia, et me mis sur une galère qui m’amena jusqu’à Marseille.

Pendant tout ce voyage, je n’eus l’esprit tendu qu’aux merveilles de celui que je venois de faire. J’en commençai les mémoires dès ce temps-là ; et quand j’ai été de retour, je les mis autant en ordre que la maladie qui me retient au lit me l’a pu permettre. Mais, prévoyant qu’elle sera la fin de mes études et de mes travaux, pour tenir parole au Conseil de ce Monde-là, j’ai prié M. Le Bret, mon plus cher et mon plus inviolable ami, de les donner au Public, avec l’Histoire de la République du Soleil, celle de l’Étincelle, et quelques autres Ouvrages de même façon, si ceux qui nous les ont dérobés les lui rendent, comme je les en conjure de tout de mon cœur.



Dans le Manuscrit de la Bibliothèque nationale, la fin