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souverains sont chez eux partout, même dans la maison de Dieu. D’ailleurs l’attendrissement de l’Impératrice semblait tout à fait involontaire, la manifestation n’en pouvait donc avoir rien de choquant. Malheur à ceux qui trouveraient ridicule l’émotion produite par un sentiment vrai ! Une telle explosion de sensibilité est communicative. La cordialité allemande ne se perd jamais ; il faut avoir de l’âme pour conserver sur le trône la faculté de l’abandon.

Avant la bénédiction deux pigeons gris avaient été lâchés selon l’usage dans la chapelle : au bout d’un moment ils se sont posés sur une corniche dorée qui faisait saillie tout juste au-dessus de la tête des deux époux, et là ils n’ont fait que se becqueter pendant toute la messe.

Les pigeons sont bien heureux en Russie : on les révère comme le symbole sacré du Saint-Esprit, et il est défendu de les tuer ; heureusement que le goût de leur chair déplaît aux Russes.

Le duc de Leuchtenberg est un jeune homme grand, fort et bien fait ; les traits de son visage n’ont rien de distingué, ses yeux sont beaux, mais il a la bouche saillante et de forme peu régulière ; sa taille est belle sans noblesse, l’uniforme lui sied et supplée à l’élégance qui manque à sa personne ; c’est plutôt un sous-lieutenant bien découplé qu’un prince. Pas un seul