Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/351

Cette page a été validée par deux contributeurs.

amours que quelques malveillants prêtent à l’Empereur régnant. Les distractions de ce prince ne passent…. que pour des distractions ! Ceci une fois reconnu, quelques conséquences qu’elles aient d’ailleurs pour certaines familles, on doit les ignorer sous peine d’être accusé du plus grand des crimes aux yeux d’un peuple composé d’esclaves et de diplomates : du crime d’indiscrétion.

Je suis impatient de voir l’Impératrice. On la dit charmante ; cependant elle passe ici pour frivole et pour fière. Il faut tout à la fois de la hauteur de sentiment et de la légèreté d’esprit pour supporter une existence comme celle qu’on lui a faite. Elle ne se mêle d’aucune affaire, ne s’informe d’aucune chose ; on sait toujours trop quand on ne peut rien. L’Impératrice fait comme les sujets de l’Empereur : tout ce qui est né russe ou veut vivre en Russie se donne le mot pour se taire indistinctement sur toute chose ; rien ne se dit ici, et pourtant tout se sait : les conversations secrètes devraient être bien intéressantes ; mais qui se les permet ? Réfléchir, discerner, c’est se rendre suspect.

M. de Repnin gouvernait l’Empire et l’Empereur : M. de Repnin est disgracié depuis deux ans, et depuis deux ans la Russie n’a pas entendu prononcer ce nom, qui naguère était dans toutes les bouches. Il est tombé en un jour du faîte du pouvoir dans la plus profonde