Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/283

Cette page a été validée par deux contributeurs.

acquièrent chez les étrangers importe aux princes russes plus que toute autre chose, plus que la réalité du pouvoir. En cela ils agissent dans le sens de l’opinion publique ; au surplus, rien ne peut discréditer l’autorité chez un peuple où l’obéissance est devenue une condition de la vie. Des hommes ont adoré la lumière ; les Russes adorent l’éclipse : comment leurs yeux seraient-ils jamais dessillés ?

Je ne dis pas que leur système politique ne produise rien de bon ; je dis seulement que ce qu’il produit coûte cher.

Ce n’est pas d’aujourd’hui que les étrangers s’étonnent de l’amour de ce peuple pour son esclavage : vous allez lire un extrait de la correspondance du baron d’Herberstein, ambassadeur de l’Empereur Maximilien, père de Charles V, près du Czar Vassili Iwanowitch. J’en ai la mémoire fraîche, car j’ai trouvé ce passage dans Karamsin, que je lisais hier sur le bateau à vapeur. Le volume qui le contient a échappé à la vigilance de la police dans la poche de mon manteau de voyage. Les espions les plus fins ne le sont jamais assez ; je vous ai dit qu’on n’a point fouillé ma personne.

Si les Russes savaient tout ce que des lecteurs un peu attentifs peuvent apprendre de l’historien flatteur dont ils se glorifient, et que les étrangers ne consultent pourtant qu’avec une extrême défiance, à cause