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voyages se refroidit quand je considère qu’ils se composent uniquement de départs et d’arrivées. Mais que de plaisirs et d’avantages on achète par cette peine !!! N’y trouvât-on que la facilité de s’instruire sans étude, on ferait encore très-bien de feuilleter les divers pays de la terre en guise de lecture : d’autant qu’on est toujours forcé d’en joindre quelque autre à celle-là.

Quand je me sens près de me décourager au milieu de mes pèlerinages, je me dis : si je veux le but, il faut vouloir le moyen, et je continue ; je fais plus, à peine revenu chez moi je pense à recommencer. Le voyage perpétuel serait une douce manière de passer la vie, surtout pour un homme qui n’est pas d’accord avec les idées qui dominent le monde dans le temps où il vit : changer de pays équivaut à changer de siècle. C’est une époque bien reculée que j’espère étudier en Russie. L’histoire analysée dans ses résultats, voilà ce qu’un homme apprend en variant ses voyages, et rien ne vaut cet enseignement des faits appliqué en grand aux besoins de l’esprit.

Quoi qu’il en soit, la composition de notre société pendant cette traversée est si amusante que je ne me souviens pas d’avoir rencontré rien de semblable ; la réunion de quelques personnes spirituelles ne suffit pas toujours pour former un cercle agréable ; il faut encore des circonstances qui mettent chaque individu en