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digne et capable de supporter la vérité tout entière, c’est le traiter presque comme Dieu, avec qui l’homme bien malheureux ne fait pas de cérémonies dans ses prières.

L’Auteur a profité de son isolement pour s’affranchir de toute vaine circonspection ; il eût encouru des reproches bien plus sévères et bien mieux fondés, si au lieu de tirer le meilleur parti possible de son indépendance et de son obscurité, il eût cédé à toutes les petites considérations de convenance pour faire dans ses pâles récits de la diplomatie d’amateur ; certes, c’est alors que les lecteurs, même ceux des salons les plus prudents, qui ont bien assez de la diplomatie obligée, auraient eu le droit d’exiger de lui la hardiesse, et de regretter l’indépendance et la sincérité dont certains critiques lui font un crime aujourd’hui ; et nous ne doutons pas que les lecteurs n’eussent exercé leur droit. Il a donc lieu de s’applaudir d’avoir obéi uniquement à sa conscience sans craindre un blâme qui, après tout, ne porte que sur des choses accessoires et entièrement étrangères au fond de la question et au point de vue du livre. En effet, on se demande ce que deviendrait l’histoire si les contemporains se laissaient arrêter par la peur d’être accusés d’indiscrétion. On n’a jamais tant craint en France de blesser le bon goût que depuis qu’il n’a plus de juges ni par conséquent de règles.

Peut-être n’est-il-pas hors de propos de répéter ici